Intervention de Bernard Jomier

Commission d'enquête Hôpital — Réunion du 24 février 2022 à 14h00
Audition de M. Olivier Véran ministre des solidarités et de la santé

Photo de Bernard JomierBernard Jomier, président :

C'est une bonne nouvelle, car je suis intervenu à de nombreuses reprises sur cette question dans le cadre de fonctions antérieures. Je voudrais compléter les interrogations de la rapporteure. Pendant un certain nombre d'années, on n'a pas recruté de soignants, parce qu'il fallait réduire les coûts. Même si les ratios n'étaient pas formalisés, de facto, le nombre d'infirmières diminuait dans les hôpitaux, la masse salariale représentant la principale dépense annuelle.

Vous avez rappelé que les lits étaient fermés, faute d'un nombre suffisant d'infirmiers. Les institutions, les établissements, les directeurs d'hôpitaux et les soignants ont confirmé, lors des auditions, que de nombreux lits étaient fermés. Ma question est la suivante : supposons que l'hôpital redevienne attractif et que les infirmières postulent à nouveau, jusqu'à quelle limite va-t-on recruter des professionnels ? Allons-nous revenir aux ratios Copermo, non écrits sur le papier et non réglementaires, ou allons-nous privilégier des ratios plus élevés ? Il y a un mot que vous n'avez pas prononcé, alors qu'il a été évoqué tout au long de ces auditions, c'est « crise de sens du métier ». Les directeurs nous ont confirmé que si les mesures du Ségur sont significatives sur le plan des revalorisations, les soignants ne reviennent pas à l'hôpital. Cette question de la crise de sens de leur métier, qui ne touche d'ailleurs pas que les soignants, nécessite d'autres réponses.

Il faut proposer un cadre de travail adapté et satisfaisant aux soignants. Cette réponse est importante. Il y a trois jours, à Strasbourg, une infirmière nous rappelait qu'elle éprouvait avant une grande fierté à exercer son métier, mais que ce n'était plus franchement le cas, à cause de ses conditions de travail. Ce discours est récurrent. Lors des auditions, je constate une grande différence de discours entre les institutions et les soignants. Elle est réellement marquante : un fossé tend à se créer. Ce ne sont pas les mêmes mots qui sont utilisés. Les soignants, y compris les jeunes soignants, décrivent l'hôpital comme un lieu de violence institutionnelle, et utilisent des mots très durs. Ce constat est inquiétant. A contrario, les institutions représentant l'État utilisent un discours et des processus en décalage total avec la réalité vécue par les soignants. Ce fossé explique une partie de la crise que connaît l'hôpital. Cette dernière ne se résoudra pas seulement par l'apport de moyens financiers.

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