Intervention de Philippe Even

Mission commune d'information sur le Mediator — Réunion du 5 mai 2011 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe Even professeur émérite à l'université paris-descartes président de l'institut necker auteur d'un rapport avec M. Bernard deBré sur la refonte du système français de contrôle de l'efficacité et de la sécurité des médicaments

Philippe Even :

Aujourd'hui paraît Les leçons du Mediator. Ce livre reprend l'intégralité du rapport de M. Debré et moi-même ainsi que ses annexes, qui ne figuraient pas dans le rapport en ligne. Celles-ci comportent des données chiffrées intéressantes. Tout d'abord, une analyse de la valeur scientifique des personnes engagées dans la recherche médicale à partir du nombre de leurs publications et de la qualité des revues dans lesquelles elles interviennent. S'il existe une marge d'erreur, les écarts sont tels que se dégage une cartographie de la valeur des membres et experts des commissions de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (l'Afssaps). Ensuite, le nombre de contrats dont sont titulaires les experts, présidents et vice-présidents de commission de l'agence en distinguant clairement ce qui relève de la rémunération reçue pour leurs services aux laboratoires, celle pour participation à des congrès - elle est marginale - et leurs rémunérations personnelles. Certains, tenez-vous bien, cumulent jusqu'à 150 contrats avec l'industrie pharmaceutique ! Cela n'aurait rien de choquant s'ils n'étaient pas également juges de la valeur et des risques du médicament.

En outre, ce livre a le mérite d'aborder un point peu étudié : quid du rôle des médecins dans l'affaire Mediator ? Si j'ai tendance à exonérer les médecins généralistes, les médecins de terrain, de toute responsabilité compte tenu de leur formation insuffisante en la matière, je serai moins indulgent envers les praticiens universitaires. Ceux-ci ont une connaissance parfaite de la centaine de molécules qu'ils utilisent tous les jours. En revanche, il y a de quoi être surpris de leur ignorance des 12 000 formes thérapeutiques existantes dans les officines pour 1 500 principes actifs - cela vaut pour moi, comme pour les autres, avant que je ne tombe dans les problèmes du médicament à cinquante ans- ; de leur naïveté ou de leur désintérêt à l'égard des procédures de découverte des médicaments, de la qualité des essais cliniques - malgré les progrès accomplis depuis vingt ans, ceux-ci sont souvent biaisés - et, enfin, des mécanismes d'action des médicaments. De fait, nous ignorons si le médicament n'agit pas aussi sur d'autres mécanismes physiologiques sains. D'où le risque d'accidents thérapeutiques.

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