Il s’agit d’une question que nous souhaitons vous poser, monsieur le ministre, et je rappelle dans quel esprit.
La dématérialisation de nombreuses transactions est une réalité de la société actuelle, réalité qui va aller croissant. Bien des opérations et des transactions qui se déroulent de façon classique, physique, sont appelées à se reporter de plus en plus sur Internet. C’est un fait de société, je le répète.
Dès lors, il me semble logique que nous nous interrogions sur la réalité des transactions et des activités, professionnelles ou non, qui s’exercent sur la Toile.
Que l’on s’entende bien, il ne s’agit pas d’exprimer une méfiance particulière de notre part envers Internet, bien au contraire. Le principe de neutralité nous semble essentiel. Une même transaction, qu’elle soit réalisée dans une brocante ou par l’intermédiaire d’un site Internet, doit à mon avis être traitée de la même façon.
Soit elle est occasionnelle, soit elle est répétitive. Dans ce dernier cas, le commerce électronique, s’il vient à représenter une part significative des revenus de la personne qui s’y livre, ne doit en aucune façon pouvoir constituer un moyen d’évasion fiscale.
L’amendement n° 16 vise à approcher la définition du seuil de transactions qui fait passer l’activité du vendeur de la catégorie occasionnelle à l’activité répétitive, cette dernière pouvant être considérée comme une activité de nature lucrative régulière, professionnelle, avec l’ensemble des conséquences fiscales qui doivent s’y attacher.
La commission des finances a suggéré des seuils d’activité et de chiffre d’affaires. Nous ne sommes absolument pas certains que ces seuils soient les bons. Il ne faut donc pas les prendre au pied de la lettre. Ce qui importe, c’est la réflexion que nous souhaitons lancer, et qui est d’ailleurs de portée assez générale.
Nous avons évoqué un sujet très proche, voilà quelques mois, avec notre collègue Yann Gaillard, lors de l’élaboration et du dépôt de notre proposition de loi sur les ventes aux enchères. En effet, c’est un domaine où le fait de passer par un site, une plate-forme de transaction électronique ne transforme pas la réalité de l’opération ; par conséquent, ce qui obéirait à un certain droit et à une fiscalité précise dans le cas de la réalisation de l’opération par un moyen classique doit logiquement obéir à une fiscalité et à un droit voisins lorsque la transaction se fait par voie électronique. C’est le principe de réalité.
Nous débattions tout à l'heure, en matière de procédure fiscale, de la notion d’abus de droit, et nous évoquions la nécessité de retrouver la réalité des opérations, quelles que soient les modalités.
Nous avons la conviction forte, monsieur le ministre, que, si nous ne voulons pas voir, dans les années à venir, certaines assiettes fiscales se réduire, il va falloir trouver des moyens innovants, mais équitables, transparents et justes, afin que le principe de neutralité s’applique à des transactions identiques, quels qu’en soient la forme, les modalités, le support, la technologie.
Au total, les dispositions que préconise cet amendement apparaissent nécessaires pour limiter l’évasion fiscale par le biais du commerce électronique, d’autant que les dispositions législatives actuelles ne contraignent les opérateurs à conserver les données relatives à leurs clients que pendant un an. L’administration fiscale doit donc avoir les moyens d’identifier les cas les plus flagrants de dissimulation d’activité commerciale.
C’est un sujet délicat, mais incontournable, à notre sens.