Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 8 février 2011 à 14h30
Immigration intégration et nationalité — Article 21 ter

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

L’article 21 ter a été inséré dans le projet de loi sur l’initiative des députés. Il s’agit d’une incongruité juridique.

Dans un « mariage gris », l’un des conjoints est amoureux, l’autre pas, ce dernier étant forcément le ressortissant étranger… Telle est, en résumé, la situation !

Le merveilleux texte introduit par l’Assemblée nationale visait à appliquer aux « mariages gris » – nous sommes vraiment ici en pleine grisaille juridique ! –, en les portant à sept ans d’emprisonnement et à 30 000 euros d’amende, les peines prévues par l’article L. 623-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile pour réprimer les mariages de complaisance, une quarantaine de condamnations par an en moyenne étant prononcées pour ce motif.

Pour sa part, la commission des lois du Sénat a choisi de revenir aux peines actuellement prévues par l’article L. 623-1 du CESEDA et de préciser que « ces peines sont également encourues lorsque l’étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint ».

Je félicite la commission pour son imagination ! Franchement, il fallait y penser ! Je souhaite bonne chance à qui voudra apporter la preuve d’une telle dissimulation d’intentions !

D’ailleurs, aux pages 122 et 123 de son rapport, M. Buffet exprime lui-même de très fortes réserves sur cet article, en faisant observer, de façon tout à fait pertinente, que « les “mariages gris” sont d’ores et déjà inclus dans le champ de l’infraction de mariage frauduleux réprimée par l’article L. 623-1 du code des étrangers ».

Dans ces conditions, qu’est-ce que ce « mariage gris » ? En réalité, cette infraction n’a aucun sens ! La commission des lois a tenté d’atténuer les choses en ramenant la sanction prévue à cinq ans d’emprisonnement et à 15 000 euros d’amende et en faisant référence à la dissimulation de ses intentions par le conjoint étranger, mais je crois vraiment que l’on aurait pu se passer de cet article 21 ter, qui ne changera strictement rien, dans la pratique, en matière de poursuites en cas de mariage de complaisance et n’aura qu’un bien triste effet d’affichage…

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