Intervention de François Bonnet

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 28 janvier 2022 à 10h35
Audition M. François Bonnet président du fonds pour une presse libre

François Bonnet, président du Fonds pour une presse libre :

Si Eric Zemmour présentait un projet qui ne violerait pas la loi par son projet éditorial et qui n'ouvrirait pas à la voie à des condamnations à répétition pour haine raciale, nous pourrions le soutenir. S'il affichait un vrai modèle économique, une structure de capital transparente et indépendante, sans conflit d'intérêts, nous examinerions ce projet, comme toute candidature.

Pour tout vous dire, nous avons aidé des titres sans coloration politique, ou dont on peut penser qu'ils partagent plutôt des valeurs de gauche. J'attends encore à ce jour de recevoir des candidatures de sites d'information ayant une coloration de droite. Je les attends. Nous nous heurtons à l'état des lieux de la situation française. Prenons Atlantico. Ses actionnaires ou ses conditions de travail ne sont pas connus. Or nous restons tenus par nos statuts, que nous n'avons pas rédigés seuls. En créant le Fonds pour une presse libre, nous avons dû négocier avec l'administration fiscale, car les dons qui nous sont faits donnent droit à une déduction fiscale. Il est donc normal que l'administration fiscale se soucie du fonctionnement et de la gouvernance de ce Fonds. Ainsi, ce Fonds de dotation a interdiction d'aider Mediapart avec des dons qu'il percevrait, société commerciale qu'il contrôle à 100 %. Il ne serait pas acceptable de financer une société commerciale avec des dons défiscalisés. C'est un point important, car le Fonds de dotation créé par SFR, qui contrôle et finance Libération, sera très bientôt concerné. Si c'est un moyen pour SFR de défiscaliser l'argent investi dans Libération, je pense que c'est un problème.

Vous m'interrogez sur le contrôle qui est effectué sur les financements. Nous menons effectivement un contrôle. Nous recevons des retours, même si nos financements sont limités. Comme le demandent beaucoup les médias jeunes, nous proposons aussi un suivi, car nous sommes une équipe de professionnels expérimentés, qui ont commis des erreurs classiques. Nous pouvons aider ces jeunes médias à les éviter. Même s'il ne s'agit pas de créer un groupe de presse ou une concentration, nous n'excluons pas des prises de participation au capital. Cela ne s'est pas encore produit, mais il pourrait y en avoir. Ces participations resteraient minoritaires, sans doute pas au-delà de 10 %. Un véritable accompagnement serait alors organisé. En outre, ces médias pourraient faire des subventions ou des investissements du Fonds pour une presse libre un label de professionnalisme et de qualité. D'autres investisseurs seraient alors rassurés par ces subventions ou ces aides.

Vous m'interrogez de surcroît sur la formation des journalistes. Le débat sur la qualité de leur formation est éternel. N'oublions pas que ce métier reste accessible à des personnes qui ne sont pas passées par une école de journalisme, dont certains journalistes brillantissimes. Je ne me sens pas de m'exprimer à ce sujet.

Vous faites peut-être allusion à Eric Zemmour, qui a qualifié des écoles de journalisme « d'écoles d'idéologie Mediapart ». Pour ma part, j'ai tendance à penser que le recrutement des étudiants est socialement trop homogène et que leur formation est parfois trop tranquille et conformiste. Je n'irai pas plus loin dans les critiques. Je suis moi-même passé par le Centre de formation des journalistes de Paris, qui est une très bonne formation et un tremplin pour des personnes n'ayant aucun réseau. Je ne serais pas devenu journaliste sans le CNJ.

Vous m'interrogez enfin sur le travail de l'AFP. C'est l'une des deux grandes agences de presse mondiales. Nous échangeons régulièrement avec cette agence. Nous avons parfois des désaccords. On ne peut pas dire que c'est une agence faible.

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