Intervention de François Bonnet

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 28 janvier 2022 à 10h35
Audition M. François Bonnet président du fonds pour une presse libre

François Bonnet, président du Fonds pour une presse libre :

Vous avez trouvé mon propos préliminaire violent et caricatural. J'ai longuement réfléchi et j'ai choisi de tenir ces propos, que je ne modérerai pas. En tant que grand lecteur de la presse étrangère, je suis ébahi par le manque de création ou d'innovation des médias appartenant à des grandes fortunes. C'est de l'immobilisme. C'est impossible, au temps de la révolution numérique, d'avoir raté tant et d'avoir fait si peu. C'est impossible de laisser se creuser un tel écart entre les lecteurs, la population et le système des médias. Tous en souffrent. Dans les manifestations, on entend désormais des slogans comme : « tout le monde déteste les médias ». Récemment, des collègues professionnels de l'AFP ont été sortis d'une manifestation. Ce n'est pas anodin. Ces symptômes ne se limitent pas à quelques fous furieux dans une manifestation. J'ai fait beaucoup de reportages sur les gilets jaunes. La fracture est grave. Il est impossible d'évoquer les groupes Facebook ou les bulles informationnelles et de laisser le système médiatique en l'état, sans critique. Il faut l'interroger et comprendre pourquoi nos publics se méfient.

En tant que journaliste, j'entends beaucoup de choses sur mon métier. On peut avoir envie de se cacher, mais je pense qu'il faut faire attention à cette rupture. Nous nous y sommes habitués. Le fameux baromètre de La Croix nous indique que la confiance dans l'information et le journalisme diminue. Il ne faut pas s'y habituer. C'est le principal reproche que je ferais à ces journaux dominants ou à la presse régionale.

Le patron du groupe EBRA affirme avoir sauvé ses journaux, mais il ne le dit pas en tenant les propos qu'il a tenus au Figaro en novembre, c'est-à-dire au prix de 900 départs et de grandes fusions entre les rédactions.

Je suis lecteur depuis 45 ans du Dauphiné Libéré. Comment seulement prétendre vendre ce journal ? C'est désespérant, y compris en termes d'information locale. Les contenus sont terriblement appauvris. Je ne mets pas en cause ici mes collègues journalistes, qui souffrent. Sachez que les fondateurs du Poulpe sont deux anciens journalistes de Paris-Normandie qui n'en pouvaient plus.

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