Intervention de David Assouline

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 28 janvier 2022 à 14h30
Audition de M. Nicolas de Tavernost président du directoire de m6

Photo de David AssoulineDavid Assouline, rapporteur :

J'entends vos réponses. Le débat continue mais des arguments sont souvent avancés pour considérer que cela va mal et que TF1 et M6 risquent d'être écrasées par les mastodontes s'ils ne fusionnent pas. Ce type d'argument avait notamment été avancé lors de l'audition d'un responsable de Bouygues. Or M6 distribue aujourd'hui des dividendes. Il en est de même de TF1 et Bouygues. Ce n'est pas le signe d'acteurs qui vont mal. Vous envisagez même de distribuer, dans le cadre du futur groupe, de 90 % du résultat aux actionnaires. Je voulais simplement surligner ces intentions.

Ma dernière question, pour cette première série, viendra en écho de l'audition, hier, de M. Thomas Rabe. Celui-ci a affirmé avec netteté que lui et le groupe avaient, en matière d'information, une culture affirmée, qui est d'ailleurs reconnue. C'est un groupe de médias qui a une réputation bien établie. Je dis souvent que c'est au vu du nombre de ses journalistes qu'on mesure l'apport d'un groupe de médias à l'information indépendante et professionnelle. Thomas Rabe citait le nombre de 1 500 journalistes en Allemagne. Cela mérite le respect. Il assurait aussi que la culture de ce groupe se distinguait par l'absence totale d'ingérence dans les rédactions. J'ai entendu que les rédactions de TF1, M6 et RTL seraient maintenues et conserveraient leur identité propre. Vous nous le confirmerez. Je constate que ce principe est déjà écorné dès lors qu'il est envisagé de mettre en place des matinales ou des émissions communes. Cela fait un seul programme au lieu de deux.

Votre franchise est connue. Je souligne, pour ceux qui ne l'auraient pas saisie, l'ironie qui s'est glissée dans vos propos tout à l'heure puisque vous êtes l'un des plus grands pourfendeurs du service public. Vous assumez l'existence d'un droit d'ingérence sur tout ce qui est fait dans les médias que vous dirigez. Vous en avez usé à plusieurs reprises. À titre d'exemple, invité en mai 2015 de Maïtena Biraben, qui évoque la censure de certains sujets réalisés par des journalistes de la chaîne, vous lui répondez qu'il s'agit de pressions économiques et non politiques. « Je ne peux pas supporter que l'on dise du mal de nos clients. Nous vivons de nos clients ». Vous expliquez : « il y avait une émission de Capital sur la téléphonie et nous sommes parties prenantes puisque nous détenons M6 Mobile, de l'opérateur Orange. Je leur ai expliqué que si on faisait une émission sur la téléphonie et qu'elle était bonne pour Orange, on aurait forcément dit que c'était compréhensible et si elle était mauvaise pour Orange, on se serait fâché avec notre client, donc il y a des choses à éviter ». En septembre 2012, un reportage du magazine Capital sur l'opérateur mobile Free avait été repoussé puis déprogrammé de la chaîne, déclenchant une pétition des journalistes de la chaîne privée, qui pointaient acte de censure. Un article du Figaro le relate. M. Thomas Rabe affirmait hier : « une ingérence de M. de Tavernost sur la ligne éditoriale ne serait pas compatible avec notre état d'esprit ».

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