Intervention de Nicolas de Tavernost

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 28 janvier 2022 à 14h30
Audition de M. Nicolas de Tavernost président du directoire de m6

Nicolas de Tavernost, président du Directoire du groupe M6 :

L'économique n'est pas distinct du reste. J'ai souligné que la création était une affaire de cash flow. L'information est une affaire de moyens. Si nous sommes confrontés à des systèmes étrangers d'information uniques et si progressivement nos moyens diminuent, nous serons en grande difficulté, y compris au plan démocratique. Je pense que nous produisons une information de qualité, qui est nécessaire dans une démocratie. Elle n'est pas orientée et s'efforce d'être aussi indépendante que possible. En matière de radio ou de télévision, le groupe M6 a fait la preuve de son indépendance. Je ne vois pas en quoi celle-ci pourrait être remise en cause.

Certes, la séparation entre les actionnaires et les dirigeants n'est pas de nature juridique, puisque le dirigeant est responsable devant l'actionnaire, comme l'a rappelé M. Assouline. Il a cependant la mission de développer son entreprise sur la base d'un cahier des charges extrêmement précis, établi par le CSA. Il faut aussi faire confiance à l'historique des acteurs, en particulier lorsque deux actionnaires, tels qu'ils se présentent devant vous, ont un historique d'indépendance et de confiance dans leur management. Je crois qu'il n'y a eu que quatre présidents, y compris M. Bouygues, dans l'histoire du groupe TF1. Nous en avons connu deux dans l'histoire de MEA, Jean Drucker et moi-même. Ce ne sont pas des gens qui sont là pour le court terme. Ce sont des personnes qui investissent et font confiance. Cet historique devrait, à mon avis, être de nature à rassurer nos interlocuteurs.

Nous avons un grand groupe public, qui est de loin le plus important en France, que ce soit par le nombre de journalistes, le nombre de chaînes ou les moyens qui lui sont alloués par la puissance publique. Nous avons un groupe, autour de la télévision payante, que vous avez auditionné ce matin. Nous avons un groupe, principalement autour de la télévision gratuite, c'est-à-dire deux groupes privés, avec des zones de concurrence assez fortes, d'ailleurs. Or l'équilibre moderne tel qu'il se dessine au plan international, est déjà un paysage concurrentiel. Examinez bien les regroupements qui s'opèrent dans tous les domaines de consolidation. Pendant que nous devisons, des regroupements gigantesques ont lieu entre Fox et Disney. Netflix vient d'installer à Hollywood son co-CEO. Il n'y a pas de frontière des Ardennes pour l'audiovisuel français. Nous sommes confrontés à ces acteurs, qui sont plutôt avantagés par la réglementation qui leur est imposée. Ils ne signent pas toujours les engagements qui leur sont donnés. Je pense par exemple à l'accord sur la chronologie des médias, que deux des plus grandes plates-formes n'ont pas signé, bien qu'il leur soit très favorable.

Le regroupement de TF1 et M6 paraît aujourd'hui une évidence. Il serait une force. Permettez-moi de vous faire part d'une opinion très personnelle. J'ai été très heureux de la confiance que Martin Bouygues et le groupe Bertelsmann me témoignent. À mon âge, j'aurais pu me retirer avec le sentiment d'avoir accompli ma mission en ce qui concerne le groupe M6. Celui-ci est en bonne santé, compte de nombreuses chaînes, se développe et n'a pas une mauvaise image. Il a une radio qui fonctionne bien. Si j'ai souhaité continuer et solliciter la confiance des actionnaires, c'est parce que je considère que la mission n'est pas terminée.

Le plus important reste à faire : c'est cette consolidation. Ceux qui la refuseraient feraient courir un grand risque à l'audiovisuel français. Je le dis solennellement devant votre commission, eu égard au contexte que forment ces plateformes, la concurrence internationale et la concentration de la production. Le premier producteur de fiction, en France, est ITV Studio, qui n'est d'ailleurs plus un acteur européen. On prendrait une responsabilité considérable... Avec les règles qui nous sont imposées et au vu des conventions qui sont sous la responsabilité du CSA, je pense qu'il n'y a pas de risque dans cette consolidation.

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