Intervention de Laurence Rossignol

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 19 décembre 2018 à 14h15
Audition de représentants de la direction des affaires criminelles et des grâces dacg du ministère de la justice

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol :

J'ai observé pendant plusieurs années la manière dont les affaires de violence sexuelle sont traitées par la justice. Vous avez dit que celles-ci représentent 1 % des affaires que poursuivent les procureurs, mais ce sont les trois quarts des affaires qui passent aujourd'hui en cour d'assises. Le décalage n'est donc pas inintéressant. En gros, 10 % des infractions sexuelles font l'objet de plaintes et 10 % des plaintes font l'objet de condamnations, soit 1 % des infractions sexuelles estimées.

Vous avez employé la formule - d'ailleurs très dissuasive pour les victimes - de « parole contre parole ». Dans un système judiciaire organisé autour de la présomption d'innocence, cela revient à mettre en doute la parole de la victime.

Vous dites qu'il faut rechercher des éléments de preuve et investiguer : vous savez comme moi qu'il n'existe parfois pas d'éléments de preuve supplémentaire. Les victimes n'arrivent pas toutes avec un prélèvement de sperme et un certificat médical !

Je suis également frappée par la manière dont fonctionne la justice familiale ou pénale, et par la suspicion terrible que rencontre la parole des femmes et des victimes. Je tiens à vous faire remarquer - parce que cela relève de vos services - que l'on continue à trouver dans les décisions des juges pour enfants et surtout des juges aux affaires familiales des références au « syndrome d'aliénation parentale ». Je croyais pourtant qu'une circulaire avait clairement établi que celui-ci n'existe pas et n'est pas identifié ! J'ai relu le document que vous avez rédigé à ce sujet : il n'est pas à la hauteur de ce qu'on en attend.

Ce sont des affaires dans lesquelles la parole des enfants victimes d'infractions sexuelles est considérée comme une manipulation d'un des parents - en général la mère. Dans les affaires d'infractions sexuelles, qu'elles concernent des femmes ou des enfants, la justice a un énorme problème avec la parole des victimes !

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