Je me suis peut-être mal fait comprendre... Les contrôles existent à Roland Garros depuis 1988. Nous avons été les premiers à les réaliser -et les seuls- malgré une forte résistance de l'association des joueurs, et plus forte encore de l'association des joueuses. Nous avons cependant tenu bon, et ces contrôles ont eu lieu jusqu'à mon départ. Il s'agissait de contrôles aléatoires sur les premiers tours et, à partir des seizièmes ou des huitièmes de finales, de contrôles systématiques sur les joueurs, comme du reste dans tous les sports, où avaient lieu des contrôles urinaires. Ceux-ci recherchaient un certain nombre de molécules qui -on ne l'a su qu'après- n'étaient vraisemblablement pas celles utilisées.
Je ne suis pas arrivé chez ASO pendant l'affaire Festina, mais durant le procès, deux ans après. Celui-ci a révélé l'ampleur des dégâts, que tout le monde connaissait. Ma première décision a été de dire publiquement qu'il n'était à mon sens impossible, pour la crédibilité du sport à long terme et, sur le plan purement économique, pour la rentabilité des événements, d'adopter une autre voie que celle de restaurer la crédibilité. Pour ce faire, il n'existait à mes yeux pas d'autre mesure possible que la tolérance zéro. Celle-ci met cependant un certain temps à s'appliquer. Nous n'avions pas de poids sur les instances et cela risquait de provoquer un certain nombre de blessures et de traumatismes.
Je me souviens avoir eu cette conversation avec le président de l'UCI, dont je venais de faire la connaissance. Il me disait que j'étais complètement fou, que je me tirais une balle dans le pied, et me conseillait d'arrêter ! Je pense que c'était une grave erreur, le sport ayant un absolu besoin de retrouver sa crédibilité. Je reste persuadé, aujourd'hui encore, que le cyclisme a toutes les armes en main pour être l'un des tout premiers sports de la planète, au même titre que le football. Si l'on arrive à rendre sa crédibilité à ce sport, je ne vois pas pourquoi les cyclistes ne seraient pas des héros, au même titre que les footballeurs ! C'est dans leur intérêt. C'est ce que j'essayais de leur expliquer, en leur disant qu'ils étaient tous potentiellement bien plus riches qu'ils ne le pensaient, mais qu'il leur fallait être crédibles.
On a tout fait pour reprendre progressivement la main. On dispose des clés d'un sport si l'on maîtrise le calendrier et les participants, qui sont souvent liés au classement. L'UCI n'avait qu'une idée : maîtriser ces deux paramètres. Nous avons pu, grâce à une particularité de la loi française, révoquer un certain nombre de coureurs au motif qu'ils portaient atteinte à l'image de nos événements, grâce au simple fait qu'ASO en était propriétaire. C'est par ce biais qu'on a réussi, à partir de 2003, année après année, à refuser des coureurs juridiquement impliqués dans des affaires de dopage. L'un des points centraux du débat est l'absolue nécessité de disposer d'une instance indépendante pour réaliser les contrôles et appliquer les sanctions, faute de quoi tous les sports vont progressivement perdre leur crédibilité !