Intervention de Christophe Deloire

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 14 janvier 2022 à 10h30
Audition de M. Christophe delOire directeur général de reporters sans frontières rsf

Christophe Deloire, directeur général de Reporters sans Frontières (RSF) :

Les questions que vous posez ne sont pas les plus simples ! Nous préconisons une régulation d'ampleur pour l'audiovisuel, tenant compte des bouleversements de l'espace informationnel.

Les régulations en discussion au niveau européen constituent des avancées, mais elles demeureront largement insuffisantes si nous voulons éviter que nos démocraties s'affaiblissent sous l'effet d'une délibération de plus en plus passionnelle et outrancière, dans laquelle la fiabilité de l'information se trouve réduite.

Il est nécessaire d'occuper tout l'espace qui ne sera pas occupé par le DSA et le DMA. La Commission européenne a lancé un projet de European Media Freedom Act. Cependant, nous avons besoin de retrouver dans la législation le moyen de favoriser des pratiques - selon la logique historique des démocraties - et de leur donner des formes d'avantages de marché. Ce qui se faisait par la régulation et par l'autorégulation a été bouleversé. L'éthique journalistique ne vaut pas grand-chose dans un espace informationnel où l'immense majorité des acteurs n'y sont pas soumis.

L'objectif de la législation doit donc être de reconstruire l'espace public en vue de défendre cette fonction sociale et les mécanismes de marché permettant de la sécuriser.

J'en viens à votre question relative aux lignes éditoriales. Il y a des tentatives de sortir de la logique de philosophie libérale visant à statuer non pas sur les contenus, mais sur les méthodes et les procédures. Il me semble important d'y rester, compte tenu des dangers de restriction qui se présentent. Les journalistes eux-mêmes sont traversés par toutes sortes d'influences. Il peut y avoir aussi des formes de corruption ou d'effets sociologiques.

Il faut sécuriser le respect de procédures minimales en matière d'indépendance éditoriale, d'éthique, de méthode, de vérification, de correction et de transparence - notamment s'agissant de la propriété des médias. Il faut également bien articuler les avantages et les obligations.

S'agissant du secteur audiovisuel, la situation est un peu compliquée. Les diffuseurs disposent d'avantages spécifiques dans l'accès à nos téléviseurs, tout en étant, sur d'autres terrains, en concurrence directe avec des chaînes YouTube ou d'autres plateformes.

Nous sommes dans une période transitoire où il faut parvenir à traiter deux sujets qui sont très différents, mais qui trouvent tous deux leur réponse dans l'articulation des obligations et des avantages.

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