La vocation et la compétence du CEPS ne sont pas d'examiner des études au cours de la vie du médicament. Pour le comité, le Mediator était non pas un coupe-faim, comme on le sait aujourd'hui, ni un antidiabétique comme le souhaitaient les établissements Servier, mais un médicament destiné à combattre les dyslipidémies, une famille de produits qui se partagent en quatre groupes : on y distingue les statines, les fibrates, les résines échangeuses d'ions - représentées par un médicament unique - et un dernier groupe de deux médicaments, largement dominé par le Mediator, dont les ventes devaient s'élever à l'époque à 200 millions de francs par an. L'autre médicament de ce groupe était le Fonlipol. Ces deux produits affichaient qu'un SMR insuffisant, mais c'était une caractéristique partagée avec huit cents autres spécialités.
Les relations entre le CEPS et la commission de la transparence sont limitées à la transmission des avis de la commission. C'était une position très ferme que j'ai prise dès mon entrée en fonctions comme président du Comité économique du médicament en 1999. Le Comité économique du médicament était alors soupçonné d'exercer - en sens inverse - des pressions sur la commission de la transparence pour obtenir des avis négatifs et faire ainsi des économies. J'ai donc décidé de ne pas avoir de rapports avec la commission de la transparence, et que le comité se bornerait à utiliser - sans les commenter - les avis écrits formulés par la commission de la transparence, mais il n'y a pas de dialogue entre ces instances. Bien sûr, il m'arrive de rencontrer mon homologue, mais nous ne parlons pas de produits spécifiques.
J'en viens au prix des médicaments. Commençons par un peu d'histoire : juste avant ma nomination en 1999, le Parlement avait institué une « contribution de sauvegarde ». Au terme de ce dispositif, le prix des médicaments serait dès lors fixé par convention entre le CEPS et les entreprises, ces dernières devant acquitter une « contribution de sauvegarde » si leurs ventes excédaient le plafond fixé par le Parlement, sauf accord sectoriel avec le CEPS les exonérant de ce paiement. Ma première tâche a donc été de construire concrètement le nouveau dispositif en élaborant les conventions qui exempteraient les entreprises de la contribution de sauvegarde. J'ai négocié un accord essentiellement de procédure avec le Syndicat national de l'industrie pharmaceutique (Snip), avant de déterminer unilatéralement le dispositif des remises quantitatives de fin d'année éventuellement versées par les laboratoires ayant signé un accord sectoriel avec le comité en cas de dépassement des ventes. Je devais faire en sorte que l'assurance maladie ne soit pas perdante par rapport au dispositif légal des « contributions de sauvegarde ». Cet objectif a été constamment tenu depuis dix ans. Nous devions donc ramasser autant d'argent, mais selon des modalités plus conformes à la politique du Gouvernement que les critères plus rustiques du chiffre d'affaires ou des dépenses de publicité. C'est pourquoi nous n'avons pas taxé le chiffre d'affaires des génériques, ni celui des produits thérapeutiques innovants. Tel était le contenu du premier accord avec le LEEM.
Par la suite, le Parlement a conféré une valeur législative à l'accord sectoriel, rebaptisé « accord-cadre ». Je souligne toutefois que le fond reste inchangé : il s'agit presque exclusivement d'un cadre de procédure. La seule règle en matière de fixation des prix résulte des instructions ministérielles : les principales innovations doivent être mises en vente à des prix de niveau européen, au moins pendant un certain temps. Le reste n'est qu'une question de procédure, à l'exception des médicaments orphelins. Ainsi, nous ne contractualisons pas avec l'industrie pharmaceutique pour les règles de fixation des tarifs des médicaments. Chaque année, l'annexe du rapport du CEPS explicite la méthode utilisée, en application du code de la sécurité sociale.