Le bureau de la politique commerciale a pour mission de représenter la France dans les instances communautaires, notamment au comité de politique commerciale, qui assure le suivi hebdomadaire des négociations menées par la Commission au nom de l'Union européenne, que ce soit avec l'OMC ou à titre bilatéral. En outre, il prépare les positions françaises quant aux instruments de défense commerciale européenne : instruments anti-dumping, anti-subventions, etc. En revanche, sa compétence est moindre pour ce qui concerne la taxe carbone : je me concentrerai donc sur les deux premières missions.
Avant tout, les mesures prises par les États-Unis au sujet de l'acier et de l'aluminium ont créé la surprise : l'année dernière, l'acier chinois ne pénétrait déjà plus sur le marché américain du fait de diverses mesures anti-dumping. En conséquence, ces dispositions ont affecté en premier lieu les partenaires des États-Unis, dont le Mexique, le Canada, les pays de l'Union européenne, le Japon et la Corée du Sud. Les autorités américaines nous ont expliqué que, face aux surcapacités chinoises, ces mesures avaient pour but de conduire l'Union européenne à réagir. Entre alliés, une telle attitude est un peu étrange ; mais, en un sens, cette politique a fonctionné. Les Européens ont réagi de plusieurs manières.
Tout d'abord, ils ont pris des mesures d'ordre juridique. Les Américains ont agi sur la base de la section 232 du Trade Expansion Act de 1962. Ce texte autorise le Président des États-Unis à prendre des mesures tarifaires d'envergure face à des importations menaçant la sécurité nationale. Or, l'Union européenne a estimé que cette réponse n'était pas adaptée. Certes, l'OMC prévoit une exception de ce type, mais la notion de sécurité nationale n'était pas définie à l'époque où les États-Unis ont pris ces mesures. L'Union européenne en a conclu qu'elles étaient illégales du point de vue de l'OMC.
Ensuite, de manière concrète, la Commission européenne a requalifié les mesures prises par les États-Unis en mesures de sauvegarde : dès lors qu'un pays de l'OMC prend une mesure de sauvegarde, un autre membre de l'OMC, s'il estime que ces dispositions ne sont pas justifiées, est habilité à prendre des mesures de rétorsions. Sur cette base, la Commission a pris une série de contre-mesures, ou mesures de rééquilibrage, qui se sont traduites par l'établissement d'une liste de produits américains assez symboliques : cette liste, dite « liste moto-bourbon », a été dressée pour cibler, aux États-Unis, une série de circonscriptions de sénateurs républicains influents. C'était là le seul moyen d'avoir une emprise sur Donald Trump. Cette action semble avoir été assez efficace.
L'Union européenne a pris une autre mesure de sauvegarde, liée au fait que la décision américaine devait conduire à un afflux de produits asiatiques vers le marché européen de l'acier. Cette crainte s'est vite révélée fondée.