J'insiste sur le fait que ces chiffres concernent principalement des données de topographie du fond de la mer ou de bathymétrie. Or la topographie n'offre qu'une vision très parcellaire du fond. Cela revient à imaginer une carte de Google Earth sans couleurs. Nous ne disposons que de connaissances très parcellaires sur la nature des fonds.
Plus on se rapproche des côtes, mieux les fonds marins sont connus. Certaines zones ont, par ailleurs, été étudiées scientifiquement. Indépendamment de l'aspect quantitatif, les travaux menés sur l'océan ces dernières années nous ont permis de comprendre un certain nombre de choses fondamentales, en particulier sur les forces qui façonnent les fonds sous-marins en termes tectoniques ou d'érosion.
On en sait à présent beaucoup sur la manière dont des organismes survivent dans des conditions extrêmes, grâce à un inventaire des mécanismes biologiques.
Il nous reste beaucoup de choses à apprendre sur la dynamique des écosystèmes, en particulier sur les relations entre le cycle de vie de ces écosystèmes et les contraintes qu'ils subissent - effets de marées, saisonnalité. Ce sont des enjeux très importants pour la résilience des écosystèmes.
Ce sont des travaux essentiels auxquels nous contribuons tous ensemble, extrêmement stimulants sur le plan scientifique.
Aujourd'hui, on n'a évalué les ressources minérales sous-marines que dans des zones extrêmement réduites de la surface du globe, principalement dans les régions dans lesquelles l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) a délivré des permis.
Nous savons aujourd'hui que des métaux - cobalt, nickel, cuivre et manganèse - se trouvent dans l'océan, en particulier dans la zone de Clarion-Clipperton.
Indépendamment des aspects quantitatifs, nous avons surtout une idée des régions qui restent à explorer. Cela peut paraître simpliste. Pour faire un parallèle facile, je dirais qu'on sait où trouver des forêts tropicales, mais c'est une chose de le savoir et une autre d'en évaluer la biodiversité. C'est la même chose dans l'océan, où l'on sait qu'il existe des probabilités de trouver un certain nombre de ressources, que l'on n'a quantifiées que dans les zones sous contrat AIFM.
On ne connaît aujourd'hui, pour être très optimiste, que 5 % de la biodiversité de l'océan profond. Les 95 % restant constituent forcément une source de richesse. Des innovations ont déjà été tirées des 5 % que l'on connaît, en matière de biomimétisme. Certaines espèces ont en effet développé des stratégies d'adaptation exploitables à des fins médicales. Par exemple, 10 % des tests PCR sont constitués de molécules extraites de zones situées à 1 700 ou 1 800 mètres de fond.