Intervention de Mathilde Cannat

Mission d'information Fonds marins — Réunion du 25 janvier 2022 à 17h00
Audition de scientifiques : Mm. Jean-Marc daNiel directeur du département « ressources physiques et écosystèmes de fond de mer » de l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer ifremer laurent kerléguer directeur général du service hydrographique et océanographique de la marine shom joachim claudet conseiller « océan » du centre national de la recherche scientifique cnrs et Mme Mathilde Cannat mandatée par le cnrs comme pilote dans la feuille de route « grands fonds » dans le cadre de france 2030

Mathilde Cannat, mandatée par le CNRS comme pilote dans la feuille de route « grands fonds » dans le cadre de France 2030 :

J'insiste sur le fait que les eaux profondes et l'atmosphère constituent un système couplé. On sait aujourd'hui que chaque élément de notre système terrestre est doté d'une fonction, mais on connaît très mal les fonctions des différentes composantes des systèmes des grands fonds.

Nous n'avons pas comme objectif de cartographier 100 % des fonds marins mais d'arriver à comprendre les fonctions, les couplages, les interdépendances et les interactions entre ces différentes composantes.

Les conditions de vie du fond des océans sont hostiles. Les taux de croissance sont très faibles par rapport aux milieux terrestres, et les organismes sont peu nombreux, mais la diversité est extrême d'après ce que l'on sait.

On connaît néanmoins les grandes fonctions de l'océan profond. C'est cet océan qui permet actuellement à la terre de se réchauffer moins vite, grâce au stockage de chaleur. Nous savons toutefois que lorsqu'on stocke de la chaleur dans les eaux profondes, on déstabilise un système, sans savoir jusqu'à quel point.

De même, on sait que l'océan stocke du carbone grâce aux micro-organismes présents à la surface, qui descendent ensuite au fond, une fois morts. Ce carbone est ensuite réutilisé dans la biosphère profonde, sans qu'on sache exactement comment. Il est très important de maîtriser ces mécanismes avant de perturber ces écosystèmes. Les populations locales détiennent aussi un certain nombre de connaissances liées à l'océan.

Nous devons considérer l'océan comme un système global qui nous concerne tous : les microplastiques se retrouvent dans les endroits les plus extrêmes de l'océan profond, jusqu'aux fosses de subduction, à 9 000 mètres ou 10 000 mètres de profondeur.

Il est par ailleurs très important, dans les décennies qui viennent, que la recherche sur le milieu naturel soit couplée avec une connaissance en sciences humaines plus approfondie, pour informer les politiques de manière responsable.

Comment vulgariser ces connaissances ? Leur transmission n'est pas un processus à sens unique mais un échange réciproque. Les chercheurs alimentent les connaissances, mais une mobilisation plus générale est nécessaire.

Le schéma projeté tend à faire comprendre les interactions qui existent entre les différents milieux qui constituent l'océan profond. Des transferts physiques et biologiques peuvent s'établir par le biais de la température ou de la densité de l'océan, les ressources minérales, qui intéressent particulièrement cette mission d'information, participant de ces interactions.

Les sources hydrothermales des dorsales ou celles qui se forment au fil des millions d'années par agrégation de métaux, à partir de l'eau de mer, sont des processus dans lesquels les micro-organismes sont impliqués à toutes les étapes.

Le but des programmes de recherche sur les grands fonds marins est de comprendre les interdépendances entre la vie, les roches, l'océan et l'atmosphère. C'est un enjeu majeur pour les sciences du climat, la planète et la vie, mais aussi pour fonder le cadre culturel, législatif et politique qui va permettre un usage durable des fonds marins.

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