La dernière intervention, à propos de la très faible résilience des grands fonds, était très intéressante.
Pourquoi connaît-on si mal l'océan ? Tout d'abord, nous n'y avons pas consacré assez de moyens, sans doute par manque d'intérêt. On s'intéresse aujourd'hui à l'océan en raison du changement climatique, de ses ressources minérales potentielles, des risques naturels de submersion, de tsunamis, etc., ou pour l'exploitation des énergies renouvelables.
La maritimisation des économies nous conduit à comprendre qu'il est temps pour la France de se donner les moyens de connaître les océans.
Cependant, pour mesurer l'océan, il faut s'y rendre. Certes, l'océan bénéficie de capacités d'observation depuis l'espace, mais les micro-ondes qui permettent, depuis un satellite, de traverser l'atmosphère, ne pénètrent pas dans l'océan - ou très mal -, ce qui nous prive de moyens performants pour réaliser un grand nombre de mesures sur les terres immergées.
Cela coûte également cher. Il faut se déplacer en bateau, avec un équipage, et parcourir des distances considérables. Tout cela explique pourquoi on connaît si mal ce milieu. La mesure des profondeurs n'en est qu'un des aspects. La gravimétrie et la nature des fonds sont encore moins bien connues.
De plus, cette connaissance est très mal répartie : elle est essentiellement focalisée sur les grandes routes de navigation et les littoraux, où se trouvent la majeure partie des activités humaines.
En outre, la question de la résolution joue également dans la connaissance de l'océan. Seuls 20 % de l'océan sont connus, selon le projet Seabed 2030 de la Fondation du Japon et de GEBCO (General Bathymetric Chart of the Oceans), dont les objectifs sont somme toute assez modestes en termes de résolution, et notoirement insuffisant si on prétend faire de l'analyse ou de l'exploration des fonds marins.
On n'aurait jamais retrouvé le sous-marin La Minerve, perdu en Méditerranée, avec de tels moyens d'exploration. Un sondeur bathymétrique, par 3 000 mètres de fond, donne un pixel de 30 mètres. Les morceaux de sous-marin répartis sur le fond étant inférieurs à cette maille de 30 mètres par 30 mètres, on n'avait aucune chance de pouvoir le découvrir depuis la surface. Cette notion de résolution est donc très importante. Pour certaines opérations, il faut se rapprocher du fond.
Enfin, pour rester sur le programme Seabed 2030, on est passé d'un niveau de connaissances très faible à un niveau de connaissance de 20 %. Ce n'est guère exceptionnel, mais cela représente une forte progression. On l'a fait assez facilement parce qu'il s'est agi, dans un premier temps, de décloisonner des données qui dormaient sur des disques durs de laboratoires.
Pour passer de 20 % à 100 %, il faudra continuer à décloisonner mais, pour l'essentiel, ce sont des données nouvelles qu'il faudra aller rechercher en mer, ce qui est long et coûteux.
Enfin, la vulgarisation n'est pas une spécialité du SHOM. Cela étant, on a fêté en 2020 les 300 ans de l'hydrographie française. On a organisé un certain nombre de manifestations en France et outre-mer pour promouvoir la connaissance des océans et les activités qui s'y déroulent. Cela a été l'occasion d'échanger avec les visiteurs des différentes expositions mises en place.