Intervention de Jean-Baptiste Blanc

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 26 octobre 2022 à 11h05
Enquête réalisée par le conseil des prélèvements obligatoires sur la prise en compte par la fiscalité locale de l'objectif de zéro artificialisation nette zan — Audition de M. Patrick Lefas président de chambre maintenu à la cour des comptes

Photo de Jean-Baptiste BlancJean-Baptiste Blanc, « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville » :

rapporteur spécial de la mission « Cohésion des territoires » sur les programmes « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », « Aide à l'accès au logement », « Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat » et « Politique de la ville ». - Je remercie également le CPO pour ce travail de grande qualité, d'autant qu'il n'existe pas de littérature sur le sujet. Tout est à construire. C'est ce qu'essaie de faire le Sénat avec la mission conjointe de contrôle relative à la mise en application du « zéro artificialisation nette », présidée par Valérie Létard et dont je suis le rapporteur, qui rendra ses travaux dans les prochaines semaines. Le rapport du CPO alimentera nos travaux, car en marge de tous nos sujets ZAN qui interrogent les élus locaux, il y a en toile de fond le modèle économique du ZAN, son financement et les perspectives d'une nouvelle fiscalité locale.

En effet, vous ne pouviez pas en si peu de temps proposer un grand soir de la fiscalité locale, mais vous proposez de très nombreuses pistes que nous pourrions utiliser dès le projet de loi de finances.

Comme vous le signalez, il y a déjà des taxes existantes, dont s'emparent assez peu les élus locaux. Cela est regrettable car nous sommes tous d'accord sur le fait qu'il faut fiscaliser ce sujet, en récompensant la vertu.

Des assiettes peuvent aussi être toilettées tout de suite.

Enfin, votre étude comporte un volet plus prospectif avec la nécessité de la création d'un impôt ou d'une taxe ZAN dans le cadre de la refonte de la fiscalité locale. L'aspect redistributif que vous abordez est essentiel, car il y aura des perdants du ZAN, ce qui implique des mécanismes de péréquation horizontale et verticale.

Nous avons au Sénat alerté sur les dangers de voter une loi trop vite, et sur la nécessité d'une approche territoriale ascendante, en partant des élus locaux, des schémas de cohérence territoriale (SCOT) et des droits de proposition. Les élus déposent dans chaque région des propositions via leur SCOT, puis les régions sont en train de prendre le relais pour discuter de ces propositions dans le cadre de la révision de leur schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Mais, votre rapport relève à juste titre que les villes moyennes dans leur périphérie notamment, et la ruralité, manquent d'ingénierie et d'accompagnement sur le sujet. Des réponses juridiques doivent être trouvées, éventuellement par la loi, et sans doute par les finances et la fiscalité.

S'agissant du renvoi aux travaux sur la TASCOM, nous aurions aimé en savoir plus.

Sur le modèle économique du ZAN, il faudra sans doute plus d'une étude, pour le chiffrer plus précisément. Vous produisez des chiffres concernant les friches industrielles qui sont très importants. En effet, pour l'heure nous ne savons pas si ce qui nous est proposé en matière de fonds friches, qui devient fonds vert, est suffisant pour répondre aux enjeux. Il apparaît que des sommes beaucoup plus importantes devront être mobilisées, mais il reste à savoir quelles seront les sources de financement.

Pour conclure, je souhaite évoquer les dispositifs fiscaux ciblés qu'on pourrait mettre en oeuvre rapidement.

Tout d'abord, la suppression du critère de 50 000 habitants pour la taxe sur les logements vacants et la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires me paraissent simples et rapides à mettre en oeuvre pour limiter la vacance et réguler les résidences secondaires.

Ensuite, je partage aussi votre étonnement sur la suppression du versement pour sous densité (VSD) l'an dernier. Il était certes peu utilisé, mais cela me paraitrait intéressant de le remettre au goût du jour.

Enfin, des réflexions sont en effet à mener sur les abattements et exonérations à la fiscalité locale. À ce titre, la suppression des niches fiscales artificialisantes me paraît intéressante.

La fiscalité est véritablement à même de modifier les comportements. Nous avons toutefois un léger désaccord sur le caractère artificialisant de la fiscalité. Nous sommes dans un pays qui s'est étalé, ce qui a généré par voie de conséquence de l'artificialisation et de la fiscalité.

Pour la réflexion plus prospective, de mon point de vue, il convient de taxer la rente, le comportement, ou du moins ouvrir le sujet sur la question dès lors que le foncier va devenir plus rare et plus cher. Il convient aussi de prendre en compte les écarts de potentiel fiscal. En effet, le littoral, la montagne, la ruralité sont restreints dans leurs capacités d'aménagement et seront ainsi pénalisés dans les possibilités de rendement pour financer le ZAN. Les dotations doivent sans doute être aussi revues.

Outre le potentiel fiscal, les rééquilibres nécessaires des critères de péréquation, pour qu'il n'y ait pas de perdants du ZAN, vont aussi être un sujet.

Sur la création d'un impôt ou d'une taxe ZAN, la suppression programmée de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) aurait pu être l'occasion de se pencher sur la question, mais les DMTO sont une piste très intéressante. Le transfert des DMTO au bloc communal changerait tout, et il pourrait en effet avoir un volet additionnel à ces DMTO, si la taxe d'aménagement ne suffit pas.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion