Intervention de Frédéric Rusakiewicz

Commission d'enquête sur la lutte contre le dopage — Réunion du 29 mai 2013 : 1ère réunion
Audition de M. Gérard Masson président de la fédération française handisport frédéric rusakiewicz médecin fédéral adjoint à la fédération française handisport et noël chevaudonnat responsable de la lutte antidopage de la fédération française handisport

Frédéric Rusakiewicz, médecin fédéral adjoint à la fédération française handisport :

Je vais vous présenter les détails de la lutte antidopage au sein de notre fédération. Comme le disait M. le président, 26 000 licenciés commencent une activité handisport dans le cadre du loisir, porte d'entrée vers le sport de haut niveau.

La prévention démarre dès la découverte du sport. La lutte contre le dopage dans le mouvement paralympique est grandissante. Lors des Jeux de Londres, un athlète sur trois a été contrôlé, contre un sur six lors des Jeux olympiques de Pékin. Les cas positifs recensés ces dernières années s'avèrent extrêmement faibles au regard du nombre de contrôles effectués. Nous sensibilisons en effet chaque acteur du mouvement et de la fédération à ce problème. Les cas positifs relevés ces quatre dernières années restent donc marginaux et la notion de dopage doit, autant que possible, être relativisée. Nous notons ainsi trois cas positifs en 2008, six en 2011 et quatre en 2012.

Outre des années vierges, il faut retenir, et nous pourrons en parler plus en détail, l'importance du cannabis. Nous relevons également quelques problèmes avec des médicaments utilisés comme stimulants. Les traitements chroniques suivis par nos athlètes imposent une gestion rigoureuse des utilisations à usages thérapeutiques. Ces traitements constituent une spécificité propre à notre fédération. Nous souhaitons proposer à nos athlètes une sensibilisation à l'importance de cette gestion afin qu'ils ne soient pas contrôlés positifs aux corticoïdes ou à d'autres substances prises au quotidien dans le cadre de leur pathologie. Notons également l'utilisation de compléments alimentaires, facilitée par Internet et le marketing grandissant. Certaines substances présentes dans ces compléments, comme l'hydrochlorothiazide, sont considérées comme des agents masquants. L'information à destination des sportifs s'avère dès lors nécessaire.

Je me permets d'insister sur les autorisations à usages thérapeutiques, très présentes au sein de notre fédération. Nos athlètes sont soumis aux mêmes méthodes de contrôle et aux mêmes sanctions que les athlètes valides, et cela à juste titre. Cependant, certaines techniques de prélèvements sont inadaptées. Je pense notamment à la géolocalisation. L'athlète se présente au contrôle, attend qu'une personne vienne lui ouvrir la porte. Ne pouvant entrer dans le bâtiment, le préleveur s'en va et le sportif reçoit un avertissement. De la même manière, certains prélèvements présentent un risque chez les populations myopathes ou hémophiles. Enfin, la technologie du dopage se révèle très rudimentaire.

Nous ne déplorons aucun « vrai cas » tels que nous les retrouvons dans différentes affaires récentes. Un dopage pointu et organisé nécessite des moyens financiers importants que nous ne retrouvons pas nécessaires chez nos athlètes. L'hyperactivité autonome (HRA) fait également partie de nos spécificités. Il s'agit d'une technique propre aux personnes paraplégiques ou tétraplégiques, également appelée « boosting ». Certaines personnes estiment que la HRA constitue une réelle technique de dopage. Un système de dépistage de signes cliniques a été établi dans les grandes compétitions afin de repérer les athlètes susceptibles d'utiliser cette méthode.

Le cannabis se révèle le produit dopant le plus utilisé parmi nos athlètes. Ils le consomment généralement à titre non pas dopant mais festif. Ces pratiques relèvent davantage du culturel pour des personnes ayant vécu dans des centres de rééducation, souvent isolés. Les athlètes s'ennuient et apprennent à fumer comme nous le ferions à l'armée. La consommation de cannabis entre dans leur habitude de vie. Nous avons mis en place des actions. La principale tient dans l'élaboration d'un comité directeur avec un élu, Noël Chevaudonnat, qui s'occupe des questions de dopage et coordonne toutes nos actions. Nous formons tous nos cadres, par l'intermédiaire de conférences, de colloques et de conventions du comité national olympique du sport français (CNOSF) notamment. Nous formons les escortes et les délégués aux contrôles antidopage, lors de stages de regroupements des équipes de France ou lors de journées handisports. La commission médicale se montre également extrêmement disponible pour répondre à toutes les questions des athlètes.

Pour terminer, je vous propose de vous détailler les quelques cas de dopage rencontrés. En 2008, trois personnes ont été contrôlées positif au cannabis. Toutes appartenaient à la même équipe de football pour déficients auditifs. En 2011, six cas se sont avérés positifs. L'un d'eux l'était au déturgylone, un décongestionnant nasal. Un joueur de football en fauteuil, en retard sur son autorisation à usage thérapeutique, a écopé d'un mois de suspension pour un contrôle positif à la prednisone. Dans la même discipline, un athlète a été suspendu deux ans pour consommation de cannabis. Il s'agissait là du cas le plus extrême que nous ayons rencontré. Un joueur de tennis a pour sa part été relaxé car les produits contrôlés entraient dans le cadre d'un traitement oncologique très important. L'instruction d'un haltérophile s'est vue annulée pour vice de procédure. Le dernier cas relève d'une consommation de cannabis par un joueur de tennis. Enfin, nous comptons quatre cas de dopage en 2012. Encore une fois, trois s'avèrent positifs au cannabis et un fait suite à la prise mal renseignée de compléments alimentaires.

Nous répertorions treize cas de dopages en cinq ans, avec des années vierges. Les actions que nous menons semblent porter leurs fruits mais nous restons vigilants. Je tiens enfin à signaler que nous n'avions aucun cas de dopage entre 1980 et 2007.

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