Merci, monsieur le rapporteur.
Je connais votre implication sur ces sujets depuis de nombreuses années, et je sais combien cela vous tient à coeur s'agissant du Pacifique, votre territoire. Je suis ravie de ces travaux, car nous avons besoin d'être nourris de toutes les réflexions, et c'est ensemble que nous allons porter ces dossiers.
Au 1er mars, mon ministère disposera de sa propre direction générale consacrée à la mer. Elle prendra le nom de direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l'aquaculture, et s'organisera autour de trois services, le service des pêches maritimes et de l'aquaculture durable, le service des flottes et des marins et le service des espaces maritimes et littoraux.
Je vous confirme dès aujourd'hui qu'il est prévu, au sein de cette nouvelle direction générale, une sous-direction de la planification maritime qui sera chargée de suivre les questions relatives aux fonds marins.
S'agissant de votre deuxième question, la gouvernance des fonds marins sous juridiction nationale s'inscrit dans un cadre qui combine plusieurs dimensions nationales et internationales, sous l'égide de la convention des Nations unies, qui donne un droit exclusif à la France sur les ressources vivantes et minérales dans sa mer territoriale et dans sa ZEE.
Au-delà, la reconnaissance de l'extension de notre plateau continental par les Nations unies nous confère des droits sur les espèces vivantes sédentaires et sur le sous-sol.
Il existe un outil spécifique de gouvernance pour les aires marines protégées qui s'inscrit dans une stratégie nationale, qu'il s'agisse de la métropole et des outre-mer, à terre et en mer. Celle-ci vise à restaurer les équilibres entre nature préservée et activités humaines.
En mer, le coeur de la planification de l'espace maritime repose sur les documents stratégiques de façade en métropole, appelés documents stratégiques de bassins maritimes dans les territoires ultramarins.
Cette gouvernance a une spécificité pour les collectivités du Pacifique. Les compétences sur les ressources vivantes et minérales de la ZEE ou du plateau continental sont du ressort des collectivités, à l'exception des matières premières stratégiques. La réglementation des aires marines protégées est également du ressort de ces deux grandes collectivités du Pacifique que sont la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie.
Quant aux ordonnances sur le code minier, elles sont portées par le ministre de la de transition écologique, mais mon ministère est bien entendu totalement associé à son élaboration.
Mes services travaillent sur ce sujet avec la direction de l'eau et de la biodiversité du ministère de la transition écologique, plus précisément avec le bureau de la politique des ressources minérales non énergétiques et la sous-direction de la protection et de la restauration des écosystèmes littoraux et marins.
Le Conseil national de la mer et du littoral, via son bureau, dont vous faites partie, monsieur le rapporteur, sera consulté fin février sur ces projets de textes.
À mi-chemin du délai d'habilitation, les novations essentielles intéressant le domaine océanographique ultramarin introduites par le projet d'ordonnance sont de deux ordres. Il est précisé que seules les substances minérales non énergétiques, c'est-à-dire à l'exception des hydrocarbures et les granulats marins, peuvent être exploitées en mer dans le cadre d'autorisations d'exploitation.
Le second point concerne la levée de l'interdiction d'accorder une autorisation d'exploitation sur le plateau continental ou la zone économique. Il n'y a pas de changement concernant la compétence des collectivités territoriales en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion ou encore à Mayotte en matière de délivrance des titres miniers. Les collectivités du Pacifique disposent bien entendu de leur propre code minier.
La mise en oeuvre des projets de la stratégie nationale d'exploration et d'exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins a bien été réalisée par mon ministère, en liaison étroite avec le secrétariat général à la mer. Je crois d'ailleurs que vous auditionnez le SG mer dès demain. Cela se fait aussi bien entendu avec l'Institut de recherche pour le développement (IRD), qui va réaliser deux études.
L'une porte sur l'état des lieux pluridisciplinaire des enjeux liés à l'exploitation des ressources minérales des grands fonds marins. Cet état des lieux s'accompagnera de recommandations pour éclairer la prise de décisions sur ces sujets.
La seconde étude porte sur la construction d'un cadre de gouvernance participative en matière d'exploration et d'exploitation des grands fonds marins. Ce projet comprendra, vous l'avez dit, une analyse des expériences passées ou en cours incluant une revue de la littérature et de la documentation, ainsi que l'organisation d'ateliers d'échanges.
Le coût de ces études s'élève à 1,25 million d'euros. Il reste un arbitrage à réaliser pour pouvoir rapidement les lancer.
Il faut être clair s'agissant du plan d'investissement France 2030 : les 2 milliards d'euros correspondent à l'ordre de grandeur des crédits publics pour les deux objectifs que sont l'espace et les fonds marins. Pour les fonds marins, l'ordre de grandeur sera d'environ 300 millions d'euros. Dans les grandes lignes, il va s'agir de financer les missions d'exploration, qui seront l'occasion d'accroître notre connaissance des fonds marins de manière significative et de développer des systèmes innovants d'exploration.
Ces missions concerneront l'outre-mer et la métropole. France 2030 va offrir aux industriels une véritable opportunité de mettre au point des solutions particulièrement innovantes, à un moment où, vous le savez, beaucoup de pays souhaitent se doter d'une capacité d'exploration de leur milieu sous-marin.
Les 310 millions d'euros que vous mentionnez pour la stratégie nationale d'exploration et d'exploitation des ressources minérales dans les grands fonds marins correspondent à une évaluation du coût total des actions à entreprendre, qui n'ont pas vocation à être entièrement financées par des crédits publics. Il s'agit d'y associer aussi des crédits privés et faire en sorte que l'ensemble des entreprises nous accompagnent dans cette recherche.
Il est important de le rappeler : France 2030 prendra en charge deux actions importantes, le programme de recherche scientifique, destiné à étudier le fonctionnement des écosystèmes des grands fonds et évaluer leur fragilité face à des interventions humaines, et le programme d'exploration que la France s'est engagée à mener dans le cadre des permis d'exploration de l'Autorité internationale des fonds marins.
Je précise à ce stade qu'il n'est pas question d'exploitation. C'est un sujet qui sera traité dans un deuxième temps.
Concernant les conventions internationales, le travail sur le règlement d'exploitation proposé par l'AIFM a pris du retard avec la pandémie, qui a bloqué de nombreuses réunions et rencontres. Ce règlement comportera une partie consacrée à la préservation de l'environnement marin. La France avait fait des commentaires sur la dernière version du projet, qui date de 2019. Nous attendons un nouveau projet de règlement dans les prochaines semaines.
Le règlement devrait être adopté au plus tard en 2023 et être complété par plusieurs dispositifs, en particulier par des normes et des directives, dont certaines ont été élaborées par la commission juridique et technique au cours de ces deux dernières années, et ont fait l'objet d'un appel à commentaires auprès des États et des parties prenantes. Ces projets conviennent dans leur ensemble aux services techniques français. C'est l'avis que nous avons rendu.
Notre priorité porte sur les normes et directives sur la protection de l'environnement, qui doivent être adoptées avant l'entrée en vigueur du règlement d'exploitation. Nous l'avons validé. Chaque région susceptible d'accueillir des projets d'exploitation devra faire l'objet d'un plan régional de gestion de l'environnement. Ce travail est en cours pour développer ces plans ainsi qu'une méthodologie commune.
Concernant l'Union Européenne, les discussions avec la Commission sont assez avancées pour lancer une initiative globale sur le futur traité pour la protection de la biodiversité marine (BBNJ), qui intéresse aussi les fonds marins. Il s'agit d'arriver, dans les conditions les plus favorables, à la dernière conférence de négociation sur le traité, programmée fin mars. La France est particulièrement mobilisée par cette échéance, et nous en reparlerons - du moins je le souhaite - lors du sommet « Un océan », à Brest.
Enfin, vous avez parlé de la position de la France à propos du moratoire proposé lors du congrès de l'UICN à Marseille. Je crois que le Gouvernement a été clair sur ce point. Les missions d'exploration de France 2030 ont précisément pour objet d'enrichir considérablement nos observations sur les fonds marins et d'inventorier notre patrimoine naturel. Sans cette connaissance, qui constitue la première phase, il n'y aura pas de protection crédible.
Le développement des systèmes autonomes d'exploration viendra bien entendu renforcer la capacité de recueil de données de nos organismes scientifiques. Nous en avons besoin, et France 2030 va permettre de réaliser un bon dans la connaissance des fonds marins, en nous replaçant sans doute au premier niveau mondial. C'est ce que je souhaite. Il ne faut pas fragiliser le cadre multilatéral de l'AIFM. C'est ce que nous avons dit à Marseille.