Auchan est une société non cotée, contrairement aux autres groupes représentés aujourd'hui. Nous sommes le douzième groupe de distribution alimentaire mondial ; notre chiffre d'affaires en 2011 s'élève à 44,4 milliards d'euros, dont 45 % sont réalisés en France. Nous avons cinq métiers : les hypermarchés, les supermarchés, les galeries commerciales, la banque Accord dans le crédit et une branche que nous avons appelée « nouveaux concepts », regroupant l'e-commerce, le « Drive » et Alinéa. Nous sommes présents dans trois grandes zones. En Europe occidentale, nous sommes implantés en France, en Espagne, au Portugal, en Italie, au Luxembourg. Nous sommes au Luxembourg d'abord pour des raisons opérationnelles, puisque nous y avons une activité et un magasin. Nous sommes présents en Europe centrale, notamment en Russie et en Ukraine, pays sur lesquels je reviendrai ultérieurement à propos des problématiques fiscales. Nous sommes également implantés en Asie depuis une dizaine d'années, essentiellement en Chine, où nous avons progressé très rapidement. Enfin, le groupe compte 269 000 collaborateurs.
Auchan est une entreprise un peu atypique, fondée sur une triple volonté de partage du pouvoir, du savoir et de l'avoir. Le partage du pouvoir, c'est la volonté de décentraliser les décisions au plus proche du terrain. Le directeur d'un magasin hypermarché chez Auchan a donc un fort pouvoir de décision. Le partage du savoir, c'est la formation. Le partage de l'avoir, c'est en particulier le fait que 152 000 collaborateurs d'Auchan détiennent 12 % du capital de l'entreprise. C'est d'ailleurs une caractéristique de l'entreprise dont nous sommes fiers. Nous avons également distribué 217 millions d'euros en 2011 aux collaborateurs français au titre de la participation et de l'intéressement, selon des programmes allant au-delà des simples prescriptions légales.
Nous ne nous contentons pas d'investir en Russie ou en Chine, nous continuons d'investir en France. Même si nous nous développons fortement à l'international, la France représente 45 % du chiffre d'affaires. Notre siège social est en France, notre comité exécutif est basé à Croix, à côté de Lille. Cela fait partie de nos caractéristiques. Nous réalisons d'importants investissements en France : l'activité hypermarché en France a investi 252 millions d'euros en 2011. Nous faisons travailler 17 000 PME, 8 000 fournisseurs, 6 500 producteurs agricoles. Nous avons donc des racines françaises très fortes dont nous sommes fiers.
J'en viens maintenant à la partie plus fiscale, c'est-à-dire au sujet de cette audition. Notre taux effectif d'impôt s'établit à 32,6 % en 2011, en tenant compte d'une opération exceptionnelle en Chine. Si l'on exclut cette opération, le taux d'impôt affiché sur notre rapport annuel est de 43 %. Pour la France, le taux effectif de l'impôt décaissé s'établit, pour les quatre dernières années, entre 31 % et 33 %, donc bien loin des pourcentages inférieurs à 10 % dont on a pu parler ici ou là.
Nous nous sommes livrés à un petit calcul : en additionnant l'impôt sur les sociétés et l'ensemble des taxes payées par le groupe Auchan en France - l'ex-taxe professionnelle, les impôts locaux, la taxe sur les surfaces commerciales - rapportés au résultat avant impôts, on atteint un taux effectif d'imposition de 59 %.
En termes d'organisation fiscale, nous ne sommes présents dans aucun État ou territoire non coopératif. Nous sommes implantés au Luxembourg car nous y détenons un magasin. Nous avons une centrale de référencement en Suisse, mais nous n'opérons aucune optimisation fiscale dans ce pays. Nous sommes d'ailleurs en train d'organiser son rapatriement en France, parce que ce sera désormais plus efficace d'un point de vue opérationnel. En Belgique, nous détenons une centrale de financement, avec un centre de compétences financières.
Notre politique fiscale, c'est le business avant l'optimisation fiscale. En Suisse, nous aurions pu faire de l'optimisation fiscale, mais nous avons préféré faire du business. Il convient de bien différencier l'évasion fiscale et le schéma artificiel, voire la fraude, et l'optimisation fiscale. Notre politique exclut l'évasion fiscale, les schémas artificiels opaques, etc. Nous sommes contrôlés en permanence par la DVNI, la direction des vérifications nationales et internationales, par la DIRCOFI, la direction de contrôle fiscal : nous avons actuellement dix contrôles en cours.
En termes d'effectifs, trois personnes sont affectées à la direction fiscale du groupe en France, et trois ou quatre personnes en Espagne, en Italie et en Russie.
Enfin, puisque vous nous y avez invités, je ferai quelques suggestions : la première, c'est que la France reste bien placée dans la concurrence fiscale au sein de la zone euro, qu'elle continue à développer des conventions fiscales avec Hong-Kong, l'Ukraine, la Russie. Aujourd'hui, la Russie nous refuse la déductibilité des facturations que le fisc français lui, exige de nous. Nous sommes dans une situation absurde que le Parlement pourrait nous aider à régler. La seconde, c'est d'éviter l'instabilité fiscale : le vote de cinq lois de finances pour 2011 ne nous aide pas à réduire nos coûts de contrôle fiscal et administratif.