Si vous me le permettez, monsieur le rapporteur, j'ajouterai que, lorsque je parlais tout à l'heure d'impôt « juste », je voulais dire « loyal ». En décrivant le phénomène des prix de transfert, j'ai indiqué pourquoi, d'une certaine façon, ce jeu - si tant est que ce soit un jeu - était à somme nulle, car il s'agit de répartir une assiette fiscale en décidant qu'elle ne peut pas être à 95 % dans un pays et à 5 % dans un autre, mais on sent bien que, d'État à État, la question posée est de savoir si c'est 60/40 ou 50/50 dans un sens ou dans l'autre.
La situation est plus simple quand une sorte de liaison est créée entre le pays producteur et vendeur, et le pays acheteur et revendeur, ce qui n'est pas toujours le cas : si les prix de transfert, chez LVMH, sont établis à partir d'une analyse fonctionnelle prenant en compte les coûts, les fonctions et les actifs dans leur totalité, cette analyse incorpore bien évidemment les marques et les actifs incorporels. Donc, d'une certaine façon, le prix de transfert est calculé en fonction de la redevance à la marque, qui est évidemment attachée à la France et qui, de ce fait, dans la répartition 60/40, comporte la totalité du prix de transfert.
On a pu observer chez d'autres que ce jeu était plus compliqué et que l'analyse fonctionnelle n'opposait que les coûts de distribution, de marchandisation dans le pays lointain et les coûts de production et d'innovation dans le pays producteur, mais que la marque et les actifs incorporels étaient placés dans une autre entité ou un État différent et que la notion de redevance, qui était versée ailleurs pour payer les actifs incorporels ou la marque, venait parasiter ce système. Donc, de ce point de vue, des progrès peuvent être accomplis.
Un schéma simple - d'un côté, celui qui produit, de l'autre, celui qui achète, donc une répartition assez claire de la fiscalité -, a généralement cours dans les démocraties occidentales. Mais il existe des situations plus complexes, lorsque la redevance à la marque et les actifs incorporels sont situés dans un autre pays, où la répartition est moins facile que celle que j'évoquais.