Intervention de Valérie Labatut

Commission d'enquête Incendie de l'usine Lubrizol — Réunion du 19 novembre 2019 à 16h30
Audition de Mm. Patrice Liogier secrétaire général et julien jacquet-francillon secrétaire général adjoint syndicat national des ingénieurs inspecteurs des mines julien boeldieu et Mme Valérie Labatut syndicat national des inspecteurs du travail de l'emploi et de la formation professionnelle sntefp-cgt et M. David Romieux fédération nationale de l'équipement et de l'environnement représentant la cgt dreal normandie

Valérie Labatut, syndicat national des inspecteurs du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (SNTEFP-CGT) :

Je représente le syndicat national CGT SNTEFP, qui syndique les agents des services déconcentrés du ministère du travail, dont les inspecteurs du travail et les contrôleurs du travail, qui ont pour mission de contrôler la réglementation sociale dans toutes les entreprises, notamment les entreprises Seveso et les ICPE.

Il convient de garder à l'esprit que nos missions de contrôle au sein des entreprises Seveso et des ICPE sont les mêmes que dans toutes les autres entreprises. Nous n'avons pas de pouvoirs spécifiques vis-à-vis de ce type d'entreprise. S'applique à elles l'ensemble du code du travail et nous conservons nos compétences généralistes et les principaux pouvoirs qui nous sont dévolus. Nous contrôlons ces entreprises avec la même approche que les entreprises de droit commun.

Les outils dont nous disposons sont plus ou moins coercitifs. Nous pouvons formuler des observations. Nous pouvons dresser un procès-verbal lorsque nous constatons des manquements - étant entendu qu'un procès-verbal ne fait pas disparaître un danger éventuel. Nous disposons d'un pouvoir de mise en demeure pour exiger l'application de certaines règles, par exemple la mise en place de dispositifs de captation ou de ventilation générale des locaux, s'agissant de l'exposition des salariés aux agents chimiques dangereux. Nous avons le pouvoir de saisir le juge des référés lorsque nous constatons un danger grave et imminent en matière de santé et de sécurité, mais cette procédure est très lourde et rarement utilisée. Nous avons également la possibilité d'arrêter certains travaux ou activités, mais là encore, s'agissant du risque chimique, la procédure est extrêmement complexe et difficile à mettre en oeuvre dans les faits.

Une des problématiques saillantes est celle de la sous-traitance. Dans les entreprises Seveso interviennent de nombreuses entreprises sous-traitantes, employant des salariés fragilisés dans l'exercice de leurs droits et particulièrement exposés aux risques professionnels. Souvent, ces salariés ne connaissent pas les sites sur lesquels ils interviennent, ce qui majore le risque d'accident de travail. En filigrane se pose la question des plans de prévention, qui constituent souvent une obligation purement formelle, lorsqu'elle est remplie. Il arrive aussi qu'ils soient inexistants. De nombreux accidents industriels survenus ces dernières années ont révélé des carences en la matière. Se pose aussi la question plus fondamentale visant à savoir s'il faut continuer d'autoriser la sous-traitance, et différents niveaux de sous-traitance, dans les entreprises où les risques sont à ce point majorés.

Je ne reviens pas sur la question de la formation des salariés des entreprises sous-traitantes. Nous savons que la sous-traitance est souvent en cause dans les accidents industriels dont nous avons eu à connaître.

Des tensions peuvent par ailleurs exister, parfois, entre les obligations issues du code de l'environnement et celles contenues dans le code du travail. Nous demandons, en tant qu'inspecteurs du travail, la protection des salariés, ce qui peut nous conduire par exemple à demander la mise en oeuvre d'une extraction d'agents chimiques dangereux, de façon à les rejeter à l'extérieur après filtration, ce qui peut venir en contradiction avec des obligations créées par le code de l'environnement, qui protège davantage les riverains, les sols, les sous-sols, les rivières, etc. Lorsque nous demandons l'application du code du travail, on nous oppose parfois le code de l'environnement.

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