En octobre dernier, lors de l'examen du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, certains d'entre nous avaient prédit que le prochain scandale sanitaire serait dû à un dispositif médical. Ils étaient malheureusement visionnaires ! Le scandale est survenu alors même que le législateur vient de renforcer le contrôle des dispositifs médicaux sur plusieurs points : règles de publicité, spécifications requises pour être remboursés et évaluation. Avant le 30 juin 2012, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé doit remettre au Parlement un rapport dressant le bilan des règles applicables à la sécurité des dispositifs médicaux et présentant des mesures susceptibles de l'améliorer.
L'objet de notre mission est à la fois plus large et plus restreint. Plus restreint, puisqu'il concerne les seuls dispositifs médicaux implantables, c'est-à-dire ceux qui présentent les risques les plus élevés. Sans nous prononcer sur le fond du scandale pour lequel des instructions judiciaires sont en cours, j'observe que celui-ci porte malgré tout sur l'un des dispositifs les plus contrôlés car les plus risqués.
Notre travail, qui devrait nous conduire à élaborer des recommandations, s'inscrit dans le calendrier communautaire. Une consultation publique est en cours depuis 2008, pour réviser la réglementation applicable, le projet devant être finalisé le mois prochain.
Le Gouvernement, à partir de l'affaire PIP et des inspections qu'il a diligentées, a fait des propositions de renforcement des investigations cliniques préalables. Faut-il instituer une autorisation de mise sur le marché, comme pour les médicaments ? Le dispositif de surveillance et de transparence des organismes chargés de la certification doit être également examiné, en l'absence de vision commune des exigences qui incombent à ces organismes.
Des propositions sont à faire en matière de contrôle. Dans le scandale PIP, les contrôles n'ont pas permis d'y voir plus clair. Faut-il aller plus loin, en exigeant de l'agence des contrôles inopinés et non plus seulement aléatoires ou volontaires ?
Il nous faut aussi adapter le système de vigilance et d'alerte. Dans l'affaire PIP, si nous avions eu un système d'alerte européen, il aurait pu réagir, dès 2007, lorsque la première difficulté a été signalée au Royaume-Uni. En France, les professionnels de santé, peut-être parce que notre dispositif est trop lourd, n'ont pas, depuis 2008, suffisamment alerté, ce qui nous renvoie au problème de la vigilance.
Notre champ d'investigation est aussi plus large que les seuls dispositifs médicaux. Les interventions à visée esthétique, que j'ai souhaité y inclure, constituent un domaine où nos conclusions sont particulièrement attendues, selon les échanges que j'ai eus avec le ministère de la santé et les responsables de nos autorités sanitaires : au-delà de la chirurgie esthétique qui constitue une spécialité médicale reconnue et réglementée, s'étend le champ de la médecine esthétique, qui est encadrée de façon très variable et relève souvent du contrat privé. Le patient y est souvent considéré comme un client ; les impératifs de santé publique ne prévalent pas toujours.
Les enjeux de notre mission touchent la santé publique et la sécurité sanitaire ; ils sont aussi économiques et culturels. J'y vois le prolongement de ma mission sur l'hypersexualisation. Il est supposé que les hommes et les femmes qui recourent à la chirurgie esthétique le font en toute conscience des risques qu'ils acceptent, selon leur libre-arbitre. Le culte et la valorisation de l'apparence qui dominent aujourd'hui notre société appellent pourtant une amélioration de notre législation mais aussi de notre système de suivi et de contrôle.
Sur le champ de notre mission, que nos premières auditions pourront contribuer à préciser, je vous propose un premier échange de vues.