au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Mes chers collègues, ces paroles sont d’une actualité remarquable, alors que, trop souvent encore, l’intelligence du geste est méprisée au profit d’une compréhension théorique, intellectualisée et formelle.
J’ai toujours eu la conviction, et je sais que vous la partagez, monsieur le ministre, qu’il fallait à tout prix refuser la hiérarchisation des formes d’intelligence. Et si la philosophie chinoise ne vous convainc pas, mes chers collègues, je vous renvoie aux enquêtes PISA menées par l’OCDE, dont la commission de la culture, de l’éducation et de la communication a auditionné un représentant.
Ces enquêtes internationales menées pour mesurer les connaissances et les compétences des jeunes à l’âge de quinze ans ont montré que les élèves français ressentaient une angoisse profonde devant les mathématiques. On ne retrouve cette peur nulle part ailleurs. Les élèves français et leurs familles savent qu’ils seront sélectionnés essentiellement sur cette base. Une faiblesse en mathématiques et le lycée général vous est fermé, la filière S a fortiori bien sûr.
Les mêmes enquêtes PISA montrent, en revanche, que les élèves français éprouvent un plaisir bien réel lorsqu’ils étudient les sciences expérimentales, qu’ils peuvent réaliser des expériences, reproduire des montages, retrouver par induction les lois des phénomènes naturels. C’est ce goût et ces compétences latentes qu’il faut apprendre à développer et à valoriser.
Permettez-moi de vous rappeler, chers collègues, que la grande réforme du lycée en 1902 avait déjà conduit à rénover l’enseignement de la physique pour réduire la place de la modélisation mathématique au profit de l’analyse d’expériences réalisées devant les élèves. Il semble que nous ayons encore à progresser dans cette voie.
Il ne s’agit en aucune manière de dénigrer l’abstraction, la déduction, la théorisation ; il s’agit de reconnaître aussi la valeur de l’induction, de l’observation, de l’application pratique, au lycée général et technologique comme au lycée professionnel.
Nous devons donner à chaque jeune l’opportunité de développer pleinement ses facultés, sans l’obliger à se conformer à un modèle unilatéral. Tout enfant porte en lui des qualités et des potentialités qui doivent être encouragées.
Nous devons faire confiance à nos jeunes et les accompagner vigoureusement dans la construction d’un parcours scolaire et professionnel dans lequel ils réussiront, parce qu’ils s’y sentiront bien. C’est la voie qu’a clairement indiquée le président de la République ; c’est la voie que vous suivrez, je n’en doute pas, monsieur le ministre.
Le Sénat s’est déjà engagé en ce sens lors de la discussion du projet de loi relatif à l’orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie, en prévoyant la mise en place d’un livret de compétences. Ce livret contiendra des informations sur toutes les activités des jeunes, qu’elles soient sportives, associatives ou culturelles. Les jeunes ne seront plus uniquement jugés sur leurs résultats scolaires ; ils pourront valoriser des engagements et des projets personnels.
La première étape de la revalorisation de l’intelligence pratique, que j’appelle de mes vœux, est déjà bien engagée : je veux, bien sûr, parler de la rénovation de la voie professionnelle, qui montre, à bien des égards, le chemin pour la réforme du lycée général et technologique.
Bien sûr, une réforme des structures et des enseignements ne parviendra pas, du jour au lendemain, à modifier les représentations sociales négatives ancrées depuis longtemps dans l’esprit des familles. Mais la pompe est amorcée et la dynamique est lancée.
La réforme de la voie professionnelle généralisée à la rentrée 2009 permettra l’obtention d’un baccalauréat professionnel en trois ans et non plus quatre ans. Cet alignement de la durée des études sur celle des études qui conduisent aux baccalauréats technologique et général est le signe tangible de l’égale dignité de toutes les voies de formation.