ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. - Après vous avoir quitté nuitamment sur la loi de programmation des finances publiques (LPF), je vous retrouve ce matin pour le PLFR 2. Nous retournons dans le présent immédiat, pour un texte classique de fin de gestion pour l'année 2022. Au-delà de sa dimension technique, ce PLFR s'inscrit dans une logique de complément, de rallonge par rapport au PLFR présenté cet été et largement enrichi par le travail parlementaire. Ce premier PLFR a constitué un effort de soutien majeur de 44 milliards d'euros de crédits supplémentaires, dont 20 milliards d'euros qui ont été consacrés à la protection du pouvoir d'achat.
Le texte que je vous présente aujourd'hui est, certes, plus modeste, mais il comporte des mesures de protection et d'ajustement.
Comme le PLFR 1, il traduit d'abord une volonté de soutenir et de protéger dans un contexte de forte inflation. Une large majorité peut être rassemblée derrière cet objectif. Notre principal défi est d'aider l'économie française à résister face à la flambée des prix de l'énergie. Comme l'a rappelé Mme la Première ministre, les prix du gaz et de l'électricité seront l'an prochain plus de 10 fois supérieurs à ceux de 2020. Pour faire face à ce choc, des dispositions supplémentaires ont été ajoutées par l'Assemblée nationale au nouveau bouclier tarifaire pour 2023. Il s'agit de soutenir aussi bien les ménages, comme nous nous y employons depuis l'automne 2021, que les entreprises : il faut les encourager à produire, à investir et à embaucher. Les mesures mises en place sont coûteuses, mais de nature à consolider l'objectif de croissance fixé à 1 % pour l'an prochain. On peut débattre indéfiniment de la pertinence d'une prévision, mais la croissance dépendra surtout de la confiance et des réformes que nous pourrons insuffler au service de l'activité économique. Le présent texte contribue à créer de la confiance, car il montre que l'État continue à lutter sans relâche contre l'inflation et ses effets.
Pour renforcer le soutien aux ménages, ce PLFR met en oeuvre l'annonce de la Première ministre, le 16 septembre dernier, concernant le versement d'un chèque énergie exceptionnel à 12 millions de ménages. Pour faire face à l'augmentation de 15 % des prix de l'électricité et du gaz en début d'année, les bénéficiaires du chèque énergie classique recevront 200 euros, tandis que les ménages des troisième et quatrième déciles percevront 100 euros. En outre, la LFR 1 a prévu un budget de 230 millions d'euros pour les ménages se chauffant au fioul. Cette aide se traduit par l'attribution, à partir du 8 novembre, d'un chèque spécifique : 200 euros pour les bénéficiaires du chèque énergie ; 100 euros pour les ménages des troisième à cinquième déciles.
Par ailleurs, la Première ministre a annoncé une prolongation jusqu'à la mi-novembre de la ristourne de 30 centimes par litre de carburant pour tenir compte du blocage des raffineries et des difficultés d'approvisionnement. Cela représente un coût de 440 millions d'euros. Entre le 15 novembre et 31 décembre, la ristourne sera réduite à 10 centimes par litres. Pour autant, l'année 2023 ne sera pas synonyme de l'arrêt brutal du soutien apporté à nos automobilistes. Les « gros rouleurs », qui ont besoin de leur voiture pour aller travailler, seront favorisés : nous mettrons en place un dispositif ciblé - il sera assez proche de l'indemnité carburant travailleurs -, dont les modalités seront définies précisément au cours des prochaines semaines. Il s'agit de concentrer l'argent public sur celles et ceux qui en ont le plus besoin. Le « combien ça coûte » n'a jamais voulu dire que nous laisserions les Français à la merci de l'inflation. Seulement, dans un contexte où les taux de nos emprunts avoisinent les 2,5 % à 3 %, il serait déraisonnable de verser l'argent public sans distinction. À cet égard, le Parlement a adopté cet été un doublement du plafond du chèque carburant défiscalisé. Nous souhaitons que les entreprises se saisissent de cette possibilité à compter de 2023.
Ce PLFR soutient aussi les universités, les établissements de recherche et les centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (Crous). Un crédit de 275 millions d'euros sera immédiatement débloqué pour les opérateurs du ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Avec Sylvie Retailleau, nous savons que certaines universités sont tentées par l'enseignement à distance cet hiver. Nous préférons des amphis remplis et éclairés, même si cela doit mobiliser de l'argent public. Dans la même logique, une enveloppe de 200 millions d'euros est prévue pour les frais de carburant exceptionnels du ministère des armées, en vue de ses opérations extérieures (Opex). Ce sont donc 2,5 milliards qui sont destinés à l'aide aux Français et opérateurs de l'État.
Le texte procède aussi à des ajustements de fin de gestion dans le souci permanent de tenir les comptes publics. Les ouvertures de crédits pour assurer de nouvelles dépenses s'élèvent à près de 5 milliards d'euros, compensées par des annulations de crédits d'un montant identique. C'est donc un texte d'équilibre budgétaire hors dépenses exceptionnelles liées à la crise de l'énergie.
La principale ouverture de crédit, de 2 milliards d'euros, tend à soutenir France compétences, dont la situation résulte de l'envol du nombre des contrats d'apprentissage, ce qui est une bonne nouvelle pour les jeunes et les entreprises. La LFR 1 avait déjà ouvert 1,8 milliard d'euros de crédits pour cette institution, et près de 750 millions d'euros pour les primes d'apprentissage. Nous devons évidemment continuer à rechercher des économies structurelles chez France compétences. Nous aurons ce débat important lors du projet de loi de finances (PLF), puisque des amendements ont été retenus par le Gouvernement, après le déclenchement de l'article 49, alinéa 3, pour réaliser des économies supplémentaires.
Autre ouverture significative : 1,1 milliard d'euros en faveur de la mission « Défense » financeront notre soutien militaire à l'Ukraine. Nous ouvrons également 450 millions d'euros de crédits pour le prolongement de l'indemnisation des crises agricoles survenues cette année. En contrepartie, nous procédons à des annulations de crédits équivalentes.
Notre second objectif prioritaire est de tenir nos comptes conformément à nos engagements européens et nationaux. Hors dépenses exceptionnelles liées à la crise de l'énergie, les 5 milliards d'euros sont gagés.
Preuve de cette ambition, le solde budgétaire est en très légère amélioration et le déficit public devrait s'établir à 4,9 % du PIB en 2022, soit 0,1 point de mieux que la prévision réalisée pour la dernière LFR. Cela est dû à une réévaluation des recettes - notamment de l'impôt sur le revenu (IR) et de l'impôt sur les sociétés (IS) - plus élevée que les dépenses nouvelles. C'est aussi le signe que notre économie résiste ; celle-ci enregistre tout de même une croissance à 2,5 % - cet objectif était remis en doute par certains prévisionnistes il y a peu. Certaines de nos entreprises continuent à investir, comme en témoignent les chiffres de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).
Il ne convient pas de s'adresser des satisfecit, mais il faut reconnaître cette trajectoire de sérieux qui n'a rien à voir avec l'austérité. Nous la tiendrons en 2023 et pour les années suivantes afin d'assurer la stabilisation de la dette et le retour du déficit sous les 3 % du PIB avant la fin du quinquennat. Nous pouvons nous rassembler derrière ce double objectif : la protection de nos compatriotes et la tenue de nos comptes.