Ma réponse ne vous surprendra pas...
La prévision de croissance à 2,7 % a effectivement été jugée crédible par le HCFP. Dans la foulée, les données de l'Insee pouvaient laisser penser que l'objectif serait plus difficile à atteindre que prévu. Je rappelle qu'en juillet, le HCFP avait jugé un peu élevée la prévision de croissance qui était alors de 2,5 %, que l'Insee avait au contraire confirmée le lendemain. Pourquoi maintenons-nous nos prévisions ? Parce que l'activité continue de progresser, avec une augmentation de 2,8 % au dernier trimestre. Tout n'est pas florissant, j'en conviens, mais cela témoigne d'une économie résiliente. Les chiffres de la croissance sont même en hausse de 0,5 % - au deuxième trimestre - et de 0,2 % - au troisième trimestre -, et ce malgré la guerre en Ukraine. La production manufacturière progresse de 0,6 %. De plus, les premières enquêtes que nous avons réalisées auprès des entreprises sur le quatrième trimestre sont toutes favorables. En octobre, le climat des affaires de l'Insee est fixé à 102, ce qui suggère une croissance toujours dynamique. Par ailleurs, nos stocks de gaz sont remplis à plein pour l'hiver, éloignant le risque de rupture d'approvisionnement. Notre prévision de croissance pour 2022 est proche des dernières prévisions, à 2,6 % selon l'Insee, la Banque de France et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et à 2,5 % d'après le Fonds monétaire international (FMI).
Sur les autorisations d'emploi, le relèvement du plafond de plusieurs ministères à hauteur de 907 ETPT s'explique par la hausse du plafond pour le ministère de la justice - 691 ETPT -, dont nous voulons augmenter le réarmement, après une hausse de son budget de 40 % entre 2017 et 2023. Nous voulons aussi prévoir 8 500 postes supplémentaires de personnels de justice. L'augmentation du plafond des ETPT tire la conséquence du renforcement de la lutte contre les violences intrafamiliales, y compris au profit de la justice de proximité. Cette correction donnera effectivement lieu à un amendement de coordination dans le PLF pour 2023.
Le débat sur France compétences est légitime et important. Nous en avons déjà parlé lors du PLFR 1 ; la situation n'est pas satisfaisante et nous devons apporter des économies structurelles à cette institution.
D'abord, le succès de l'apprentissage conduit à une envolée des coûts-contrats des centres de formation des apprentis (CFA) de plus de 10 milliards d'euros. Selon la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), la hausse était, en août 2022, de 13 % par rapport à 2021. Ensuite, le compte personnel de formation (CPF) est désormais également financé par France compétences pour 3 milliards d'euros. Enfin, des recettes affectées au titre de la contribution unique à la formation professionnelle et à l'alternance (CUFPA) s'élèvent à 10 milliards d'euros, ce qui est insuffisant pour couvrir les besoins de financement.
Face à ce déséquilibre défavorable entre les recettes et les dépenses, l'opérateur a recouru à des emprunts de court terme onéreux. Les subventions de 2,8 milliards d'euros en 2021, de 4 milliards en 2022, et de 1,7 milliard d'euros prévus dans le PLF pour 2023 visent à éviter une rupture de trésorerie. Pour autant, même si nous nous réjouissons que le nombre d'apprentis soit passé de 300 000 en 2017 à plus de 700 00 aujourd'hui, nous avons décidé de déployer depuis la rentrée plusieurs mesures d'économie.
Nous ajustons les coûts-contrats aux coûts réels supportés par les CFA, conformément à la proposition n° 19 du rapport sénatorial sur France compétences de Mmes Frédérique Puissat, Corinne Féret et de M. Martin Lévrier, publié le 29 juin 2022. Entre 2022 et 2023, nous visons une baisse de 10 % des coûts-contrats dans les CFA, soit une économie de 800 millions d'euros. Ensuite, nous voulons mieux réguler le compte personnel de formation, en limitant la fraude et en éliminant du répertoire des formations qui n'ont pas vocation à être financées par le CPF. Nous avons retenu à l'Assemblée nationale, dans le cadre de l'article 49-3, un amendement permettant l'instauration d'une participation financière des bénéficiaires du CPF, telle que l'avaient proposé la Cour des comptes et la proposition n° 11 du rapport sénatorial précité. Nous allons négocier le montant de cette participation avec les partenaires sociaux, ce qui garantira de vraies formations.
D'autres mesures viseront à compléter ce plan de redressement. Nous serons très attentifs à vos propositions en la matière.
S'agissant des annulations de crédits, nous faisons plutôt des économies de constatation. Je vous rejoins, monsieur le rapporteur général, une partie d'entre elles avaient été identifiées cet été. Pour la mission « Plan d'urgence », nous annulons 500 millions d'euros sur 1 milliard d'euros. De même, l'annulation des 2 milliards d'euros sur les crédits ouverts pour les appels en garantie est un bon signe.
Enfin, monsieur le président, nous ne sous-évaluons pas les recettes, nous essayons de viser au plus juste. La prévision est toujours très difficile du fait des aléas, de la guerre, de l'inflation ; cela incite à une forme de prudence.