Les catastrophes sont certes multidimensionnelles, mais à inviter tous les acteurs autour de la table ne risque-t-on pas de devenir contre-productif ? Peut-être conviendrait-il de prévoir des formations plus resserrées pour améliorer la réactivité ?
Général Pierre Chavancy - Je crois que plus nous nous préparons, plus nous sommes efficaces le jour J. Si nous avons des fiches réflexes préparées, nous sommes mieux armés. La vitesse d'intervention est certes nécessaire, mais la précipitation peut être catastrophique. Par exemple, avant d'envoyer un hélicoptère, il faut s'assurer au préalable qu'aucun autre n'a déjà été diligenté pour éviter ce que les secouristes appellent le « sur-accident ». Cela nécessite de l'organisation et d'une certaine distance.
Le rapport de l'IGA a mis en exergue la réactivité des armées, notamment les points forts suivants :
· le suivi permanent des capacités disponibles, conformément au Livre Blanc ;
· la décision centralisée permettant plus de réactivité et une meilleure appréhension des moyens disponibles ce qui n'empêche pas une conduite décentralisée ;
· la demande d'un effet à obtenir plutôt qu'une commande des moyens ;
· l'importance de la concertation sur l'effet final recherché ;
· la répartition des rôles entre les différents acteurs. Au niveau des états-majors interministériels de zone, il y a souvent de grands absents : au-delà des spécialistes de la sécurité, les transports, l'environnement, ou la santé sont également des sujets à prendre en compte. Au-delà des Armées, la coordination interministérielle doit encore progresser.
Des voies d'amélioration, que nous avions déjà identifiées, nous ont été également suggérées :
· une pédagogie accrue envers les décideurs civils qu'il faut sensibiliser à la décroissance des moyens militaires et à l'évolution de leur maillage territorial ;
· le renforcement quantitatif et qualitatif nécessaire de la chaine OTIAD (Organisation Territoriale Interarmées de Défense), surtout dans les déserts militaires, de façon à ce que le Préfet dispose d'un interlocuteur compétent ;
· l'élargissement des délégations des OGZDS, jusqu'alors réduites à l'engagement immédiat des forces à la mise à disposition d'infrastructures militaires pour accueillir des sinistrés par exemple ;
· la meilleure implication des réservistes, qui sont des militaires professionnels à temps partiel qui connaissent souvent parfaitement le tissu local et représentent des forces vives et des relais intéressants pour l'Armée.
L'implication des populations, notamment des bénévoles nous intéresse particulièrement. Dans le département du Var, les Comités communaux des feux de forêt (CCFF) sont intervenus massivement et efficacement en 2010 et 2011.
En effet, la diffusion de la culture du risque n'est pas aisée étant donné que les informations officielles ne sont pas toujours crues par les populations ou, à l'inverse, peuvent déclencher des phénomènes de panique.
Peut-être qu'une chaîne de médiateurs avec la population, participant aux opérations régulières en cas de crise, pourrait être un élément de réponse, comme en témoigne l'exemple italien ? L'association des réservistes à une telle mission vous semble-t-elle intéressante ?
Général Pierre Chavancy - Cela ne peut être qu'une bonne idée. Les réservistes ont la culture du risque, et ils ont parfois un passé de militaire. Cette démarche est au coeur de notre réflexion. Néanmoins, nous devons savoir qui supportera le coût du maintien de réservistes sur le terrain.
Il pourrait s'agir de militaires réservistes résidant dans la commune et volontaires. Cette réserve de compétences n'est pas négligeable.
Général Pierre Chavancy - Tout à fait. Le Colonel Olivier Salaun peut développer le thème de la participation des armées et des populations à la résilience, sujet sensible et actuel.