Intervention de Isabelle de Silva

Commission d'enquête Concentration dans les médias — Réunion du 13 décembre 2021 à 15h30
Audition de Mme Isabelle de Silva conseillère d'état ancienne présidente de l'autorité de la concurrence

Isabelle de Silva, conseillère d'Etat, ancienne présidente de l'Autorité de la concurrence :

S'agissant de sujets aussi sensibles pour les actionnaires et les entreprises, nous sommes habitués à de fortes sollicitations, mais celles-ci restent dans l'ordre normal des choses. Les chefs d'entreprise souhaitent ardemment faire aboutir leur opération ; je ne qualifierais pas cela de pression anormale ou indue.

Lorsqu'on exerce les fonctions que j'ai exercées, on est apte à faire la part des choses. Je me suis toujours attachée, au cours de mon mandat, à dialoguer avec les entreprises avant d'exercer les prérogatives qui m'appartenaient, soit seule, pour les opérations de phase 1, soit, pour ce qui est des décisions de concentration de phase 2, avec le collège de l'Autorité.

Les sanctions sont-elles par ailleurs suffisantes pour empêcher les infractions au droit de la concurrence, ou certaines entreprises ne préfèrent-elles pas se contenter de payer des amendes pour continuer d'agir à leur guise ? La question est légitime. C'est un reproche que l'on fait parfois au droit de la concurrence : il suffirait de payer les amendes pour continuer à « vivre sa vie ».

Malgré tout, les amendes ont un rôle important : une fois qu'un comportement a été sanctionné, l'entreprise ne peut plus le rééditer. Non seulement elle peut recevoir une amende pour réitération, mais l'Autorité peut lui enjoindre de modifier son comportement. Elle peut même désormais, grâce à la directive visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en oeuvre plus efficacement les règles de concurrence, dite ECN+, enjoindre à une entreprise de revendre une partie de son activité, pouvoir extrêmement puissant qui, me semble-t-il, fait réfléchir les entreprises...

Voilà quelques années, certaines entreprises adoptaient peut-être, à l'égard du droit de la concurrence, un comportement de franc-tireur. Aujourd'hui, avec d'autres autorités, comme la CNIL, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, nous contribuons à faire respecter le droit - je pense aux plateformes, notamment. Il faut s'en réjouir. Nous sommes dans une phase de transition ; des décisions comme celle que nous avons prise en matière de droits voisins sont importantes pour que ces entreprises comprennent qu'elles ne sont pas en dehors du droit et des règles édictées par les législateurs nationaux et européen. À cet égard, le dossier des droits voisins est emblématique ; plusieurs plateformes avaient fortement lutté contre le projet de directive.

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