Monsieur le rapporteur, je suis très sensible à l'appréciation que vous avez exprimée. Je suis restée en poste durant cinq ans, soit la durée habituelle d'un mandat. Cela a été une expérience extraordinaire et une grande fierté pour moi de pouvoir affronter ces défis. J'en tire une très grande satisfaction. Je crois que nous avons accompli de belles choses. De fait, une reconnaissance internationale a pu m'être témoignée pendant mon mandat et à l'issue de celui-ci. J'aurais bien aimé continuer, mais la page est maintenant tournée. J'espère que j'aurai d'autres occasions de servir l'État.
On reproche parfois aux autorités indépendantes d'être trop autonomes. Leur statut donne aux autorités gouvernementales ou présidentielles la capacité de désigner régulièrement leur président ; c'est une prérogative importante. Quoi qu'il en soit, ce furent cinq années très denses, et je ne regrette pas d'avoir exercé cette belle mission.
Je répète ce que j'ai indiqué à M. Hugonet : lorsqu'une opération conduit un opérateur à occuper 70 % d'un marché, l'Autorité de la concurrence doit normalement la refuser. C'est la conséquence normale ou, en tout cas, la plus courante. En tout état de cause, considérer qu'il s'agit de la seule façon pour un groupe d'acquérir une envergure mondiale ne correspond pas aux modes de raisonnement habituels de l'autorité française ou des autorités européennes.
C'est l'une des raisons qui a conduit l'opération Siemens-Alstom à achopper. Pour les promoteurs de cette opération, il s'agissait de la seule façon de créer un champion européen ou mondial. Peu de temps après, une autre opération, Bombardier-Alstom, a pu être autorisée, qui, sans dégrader la concurrence sur les marchés européens, a conduit à la constitution d'un très grand opérateur, là encore d'envergure mondiale, mais sans constitution de monopole ou de position dominante en Europe.
Dans l'opération TF1/M6, l'Autorité aura-t-elle les moyens de maintenir la diversité de l'offre sur la TNT ? Le législateur a voulu un double contrôle, celui de l'Autorité et celui du CSA. Il me semble que le CSA aura aussi des prérogatives à faire jouer sur l'examen des autorisations d'utilisation des chaînes de la TNT, et je crois qu'il sera aussi dans son office d'examiner l'effet de l'opération sur la diversité de l'offre sur la TNT, mais, là encore, je crois que cette une question diffère quelque peu de celle sur la publicité. Effectivement, la publicité a un impact majeur sur les acteurs économiques, notamment les annonceurs, qui sont dépendants de la publicité télévisée pour diffuser un certain nombre d'annonces.
L'Autorité aura certainement à connaître du sujet plus large de la diversité dans les médias télévisés, mais cette appréciation sera, d'une certaine façon, partagée avec le CSA, dans le cadre de ses prérogatives.
Le législateur a été bien inspiré de prévoir cet avis obligatoire du CSA. L'autorité sera certainement très instruite par l'avis que celui-ci doit lui remettre, qui porte sur toutes les questions dont nous avons débattu cet après-midi.
Nous portons la plus grande attention à ces avis du CSA. Par exemple, dans la décision de 2019 relative à la revue des engagements Canal Plus/TPS, l'avis très riche du CSA a beaucoup éclairé les délibérations du collège quand il s'est agi de définir jusqu'où les obligations qui pesaient sur Canal Plus pouvaient ou non être levées au vu du nouveau contexte des plateformes OTT. Je pense que, là encore, l'avis du CSA sera extrêmement précieux.