J'interviens sur la question des fonds marins en tant que ministre de la recherche et du domaine foncier, et donc des mines.
Le mois prochain, nous présenterons en conseil des ministres la stratégie de l'innovation de la Polynésie française, laquelle s'organisera autour de six thématiques principales, dont évidemment celle de l'océan. Pour résumer notre approche, qui a fait l'objet d'une vaste concertation avec la société civile, le monde de la recherche et les partenaires polynésiens, nous ne souhaitons pas réduire l'exploration, ou en tout cas l'étude et la connaissance des fonds sous-marins, à la question minière.
On parle évidemment beaucoup du potentiel des minerais, des nodules polymétalliques, des terres rares ou des encroûtements cobaltifères et des amas hydrosulfurés, mais avant d'examiner toute la matière inerte, nous souhaitons développer et valoriser la connaissance du vivant. De ce vivant sous-marin, de l'endémisme qui existe en Polynésie française, comme en Nouvelle-Calédonie et à Wallis-et-Futuna, découleront certainement des innovations pharmacologiques, des solutions pour préserver notre sécurité alimentaire. Nous vivons actuellement un début de crise alimentaire qui va certainement s'accélérer à cause du changement climatique : il faudra utiliser l'océan comme une source de protéines et de matières alimentaires.
Pour convaincre la population, car il ne faut pas oublier qu'il est indispensable que celle-ci soutienne notre ambition d'étudier les océans, il faut commencer par satisfaire ses besoins primaires, à commencer par l'assiette, donc, la santé, le mieux-vivre et le bien-être. À travers cette exploration du monde sous-marin, il est nécessaire et parfaitement envisageable de tenir compte de ces besoins vitaux. Je n'oublie pas les besoins en matière d'énergie, mais je pense qu'il faut d'abord s'attaquer aux besoins premiers des populations, ce que vise d'ailleurs notre projet de stratégie en matière d'innovation en Polynésie française.
Deuxième remarque, nous voulons devenir un véritable partenaire de l'État, afin de renforcer les synergies et de développer une approche gagnant-gagnant. Notre statut est peut-être plus favorable que celui de Wallis-et-Futuna, puisque nous avons la pleine compétence en matière d'innovation et de recherche dans la ZEE polynésienne, mais nous avons évidemment besoin de l'expertise nationale, européenne, voire internationale.
Je répondrai à M. le rapporteur qu'il faut évidemment que nous nous organisions autour d'une norme Pacifique. Le Pacifique francophone peut et doit inventer une norme pour l'accès et le partage des avantages tirés de la valorisation de cette spécificité endémique. Nous devons nous protéger collectivement face à la mondialisation.
Enfin, il me semble que les territoires français du Pacifique se doivent d'être beaucoup plus ambitieux pour attirer l'expertise et les grandes universités dans leurs eaux. Nous devons créer des chaires internationales dans les universités et demander à ce que nos bassins deviennent des bassins d'application et de référence de l'innovation pour le compte de la France et de l'Union européenne. À l'heure où les équilibres mondiaux sont en pleine mutation, nous devons rester dans le camp de la France et dans celui de l'Occident si l'on ne veut pas être engloutis sous les ambitions impérialistes.