Oui. On a un délit qui est très large. Mais ce n'est pas parce que de l'argent circule en vingt-quatre heures de Gibraltar à Jersey, puis en Suisse, que cela constitue pénalement du blanchiment. Si l'on n'a pas l'infraction d'origine, on ne pourra pas poursuivre la personne. Cela pose aussi le problème de la fraude fiscale. L'autorité publique est-elle en droit d'exiger de chacun une transparence sur l'origine de ses revenus, de ses fonds ?
Aujourd'hui, on est en retrait par rapport à cette question, et la lutte contre le blanchiment est tout de même quelque part très entravée.
Sans avoir une vision manichéenne, je peux vous dire ceci : plus c'est noir de l'autre côté - prenez les trafiquants de drogue ou encore les mafieux, par exemple -, plus le système sera sophistiqué, plus le circuit de blanchiment sera compliqué et moins on pourra caractériser l'origine de l'argent. Alors que si l'on pouvait demander aux mafieux de justifier l'origine de grosses sommes d'argent sur un compte, ce qu'ils ne pourraient pas faire puisque l'origine est évidemment frauduleuse, on inverserait complètement les choses et on serait beaucoup plus efficace au niveau du résultat.
Toutefois, on ne tomberait pas alors uniquement sur des mafieux, seraient également concernées des personnes qui fraudent, qui détournent des fonds des sociétés. Est-on prêt, dans ce domaine, à inverser la charge de la preuve ?