Intervention de Louis Duvernois

Commission d'enquête Evasion des capitaux — Réunion du 23 mai 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean Pujol avocat conseiller élu des français à l'étranger

Photo de Louis DuvernoisLouis Duvernois :

Monsieur Pujol, comme notre rapporteur, je voudrais tout d'abord saluer l'intérêt et l'importance de votre description des communautés françaises expatriées, à la fois singulières et originales. On le voit bien avec l'exemple précis et concret de la convention fiscale bilatérale qui vient d'être signée, le 4 avril dernier me semble-t-il.

Permettez-moi de revenir sur ce sujet.

Vous avez fort bien expliqué le problème. Je souscris à votre constat puisque, étant allé en Andorre dernièrement dans le cadre d'une mission parlementaire, j'ai rencontré les autorités du Conseil général des Vallées et nous avons abordé cette question au cours de nos entretiens.

Je suis évidemment revenu à Paris intrigué. Or je n'ai pu obtenir connaissance de la première convention paraphée par les autorités andorranes et françaises qu'avec beaucoup de difficultés, comme si cette convention relevait d'un secret quelconque.

J'ai finalement pu prendre connaissance de cette convention.

La réponse que vous avez apportée concerne précisément l'article 25, que j'aimerais lire à la commission d'enquête parce qu'il est très explicite. Il tient en quatre lignes : « La France peut imposer les personnes physiques de nationalité française résidentes d'Andorre comme si la présente convention n'existait pas. Lorsque la législation fiscale française permet l'application de la présente disposition, les autorités compétentes des États contractants règlent d'un commun accord la mise en oeuvre de cette dernière. »

Autrement dit, on signe une convention tout en en déniant la signature ! J'ai rarement vu un contrat entre deux pays signataires qui, dans son texte, énonce ainsi tout et son contraire !

Je partage le point de vue qui a été exprimé par la personne auditionnée. Je considère, moi aussi, qu'un tel article relève probablement du contexte politique national qui a été le nôtre et qui perdurera probablement au cours des prochaines semaines : sans vouloir entrer dans un discours partisan, je fais bien sûr référence à la concordance de vues existant sur ces questions entre les deux principaux candidats à l'élection présidentielle. Il faut dire la vérité !

Je voudrais apporter un éclairage supplémentaire. Toute convention fiscale a pour finalité d'éviter la double imposition : c'est le principe de base des conventions fiscales. Manifestement, on introduit là une nouvelle donne qui aura des incidences non seulement en Andorre, mais aussi sur toute nouvelle législation ou convention fiscale avec d'autres pays ou, le cas échéant, tout nouvel avenant concernant l'évolution de la convention fiscale existante.

En clair, l'ajout de la clause que je vous ai lue - et donc on peut penser qu'elle fera nécessairement jurisprudence -permet de contourner très rapidement la contrainte que représente pour les États la modification des conventions fiscales existantes. En d'autres termes, on préempte toute action législative à venir en l'orientant dans le sens des intérêts de l'État.

Cette question me paraît extrêmement grave. Il s'agit en définitive d'un déni du Parlement et de son rôle premier, qui est d'exercer un contrôle sur l'action de l'exécutif.

Mes chers collègues, je tenais à vous apporter cette précision, qui va dans le sens de ce qui a été dit, et à vous faire part des difficultés que j'ai rencontrées pour obtenir copie de la convention.

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