Le sujet est tellement intéressant qu'il mériterait en réalité des heures d'échanges.
Je comprends parfaitement vos craintes. Je les partage, mais en partie seulement.
Oui, le modèle économique du football en France doit changer. Mais dans quel sens ? Le retard considérable que nous avons en France n'est plus sur les droits télévisés, puisque nous avons réussi depuis quelques années à nous mettre à peu près au niveau des droits de nos concurrents en Europe.
Le retard considérable que nous avons, c'est sur les stades. La vétusté de nos stades est indigne d'un pays qui se prétend une grande nation de football.
Et c'est d'ailleurs précisément pour cela que j'ai été à l'origine, avec d'autres, de l'idée d'organiser en France l'Euro 2016. C'est afin de refaire nos stades. Nous avons aujourd'hui dans les cartons neuf à dix projets de stades neufs ou complètement rénovés. Vous avez été impressionnés par les 400 millions d'euros que le Qatar est prêt à mettre sur le Parc des princes pour le Paris Saint-Germain, mais vous savez comme moi que le stade de Lille coûte encore plus que cela. Le stade de Lyon, qui est entièrement financé par le privé, coûte plus de 400 millions. Marseille va investir des sommes considérables dans son stade, tout comme Bordeaux. Et, quelque part, tant mieux ! Cela permettra de nous rapprocher du modèle allemand, où les recettes de stade sont à un niveau quand même convenable, alors qu'elles sont très faibles en France.
Reste la question de la solidarité. La solidarité, c'est la Ligue qui en est le garant, à travers les droits télévisés. En l'occurrence, et j'espère que j'aurai votre soutien, il faudra que cela demeure toujours comme cela.
Les droits télévisés centralisés assurent aujourd'hui 57 % ou 58 % des ressources des clubs. Ce sera sans doute un peu moins dans l'avenir si les recettes de billetterie augmentent avec les stades, mais ce sera toujours environ la moitié des recettes des clubs. C'est là-dessus que l'on pourra jouer pour assurer une répartition équitable et solidaire permettant à chacun, comme vous le dites très justement, de tenter sa chance dans un championnat à vingt, et non un championnat à deux, comme c'est le cas en Espagne. En Espagne, il y a deux clubs ; nous, nous avons un championnat à vingt.
D'ailleurs, la victoire de Montpellier, même si les techniciens et les spécialistes font la fine bouche, me ravit personnellement. En effet, vous avez observé qu'en cinq ans nous avons eu cinq champions différents. C'est unique en Europe. Ailleurs, ce sont toujours les mêmes qui gagnent : Manchester, le Real Madrid... Chez nous, on a eu Montpellier, Lille, Marseille, Bordeaux et Lyon sur les cinq dernières années : cinq champions différents ! C'est cela que nous aimons. Ce ne sont pas toujours les mêmes qui doivent gagner.