Intervention de Colette Mélot

Commission des affaires européennes — Réunion du 23 février 2017 à 8h35
Éducation — Erasmus des apprentis : avis politique de mmes colette mélot et patricia schillinger

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Je préciserai le contenu de l'expérimentation proposée.

Les apprentis partent aujourd'hui en mobilité avec le programme Leonardo, intégré à Erasmus plus depuis 2014 et destiné à l'ensemble des apprenants de la formation professionnelle. Quelques milliers d'étudiants effectuent ainsi chaque année un stage au sein d'une entreprise européenne accréditée mais les apprentis représentent à peine 1 % du total des bénéficiaires d'Erasmus plus. Leur durée moyenne de séjours ne s'élève par ailleurs qu'à 28 jours.

Outre une augmentation du nombre de bénéficiaires, à hauteur de 50 000, le projet à destination des apprentis insiste sur la dimension qualitative des mobilités, en particulier la durée du séjour. Pour cela, une enveloppe moyenne de 5 400 € par apprentis est prévue pour financer formation et préparation linguistique, et éventuellement combler les déficits de certains pays en matière de sécurité sociale. Pour y être éligible, quatre conditions s'imposent : être en partenariat avec au moins une école dans un autre pays, développer un cours d'initiation de la langue du pays, avoir un programme de formation théorique et avoir un réseau d'entreprises prêt à accueillir des jeunes venus d'ailleurs.

Si la région est le niveau pertinent du pilotage des actions de mobilité des apprentis, certains besoins ne peuvent être traités que dans des espaces de mutualisation et de concertation de niveau national ou européen. Le projet est pour le moment porté par une association créée à l'initiative du député Jean Artuis. Euroapprentissage est la dénomination d'un consortium de centres de formation professionnelle et s'appuie sur de nombreux partenaires, organisation patronales, organismes consulaires, collectivités locales ou encore entreprises. Il s'articule aujourd'hui autour de 32 centres de formation présents dans 12 pays, dont 16 centres implantés en France et en particulier dans l'Ouest.

Pour le dernier trimestre 2016, un financement de 1,8 million d'euros avait été prévu par la Commission européenne afin de permettre à 145 jeunes apprentis européens, dont soixante-quinze Français, de partir jusqu'à une année complète à l'étranger. Une trentaine d'apprentis ont déjà pu entamer une telle mobilité longue, d'une durée comprise entre 6 mois et un an. Près de 3 millions d'euros prévus au budget 2017 devraient aussi être débloqués pour une deuxième vague de 550 jeunes apprentis en « Erasmus + » à la rentrée 2018.

La demande récente de la Commission d'un budget de 400 millions d'euros pour Erasmus pro ouvre de nouvelles perspectives. Il reste cependant pour ce programme à sortir du cadre expérimental et à surmonter les nombreux freins à sa progression.

Quelles conclusions en tirer ?

Le début du projet a pu prendre quelques retards en raison de difficultés de coordination entre les deux directions DG emploi et DG EAC. Au sein même des États, les compétences sont souvent partagées entre directions chargées de l'éducation et directions chargées de l'emploi. Des efforts supplémentaires de synchronisation doivent être engagés pour faire réussir ce projet. Ce qui a été fait par le passé et surmonté pour les diplômés de l'éducation supérieure peut et doit être fait aujourd'hui pour les jeunes les moins qualifiés qui sont d'autant plus touchés par le chômage.

De nombreux obstacles juridiques demeurent. Le statut de l'apprenti et la structuration de la formation varient en effet énormément d'un pays à l'autre, toutes les formations en Europe ne préconisent pas de contrats d'apprentissage et n'ont pas les mêmes conditions de formation. Il a même été envisagé d'appliquer le régime des travailleurs détachés aux étudiants. En attendant la mise en place d'un véritable contrat d'apprenti européen, les départs doivent ainsi s'organiser en effet au cas par cas.

Un travail de communication doit aussi être activement mené. Il s'agit désormais d'inclure des populations aujourd'hui peu concernées par Erasmus. Ce nouveau public, qu'il s'agisse des apprentis ou de leur maître d'apprentissage, n'a pas toujours conscience de l'opportunité d'une mobilité, a fortiori d'une mobilité longue.

C'est dans cet esprit que la proposition d'avis politique que nous vous soumettons propose de soutenir l'initiative de la Commission européenne, tout en l'encourageant à aller plus loin et à lever les obstacles juridiques qui risquent d'empêcher ce projet de prendre toute son ampleur. Il est d'autant plus nécessaire de marquer dès aujourd'hui notre engagement en faveur de ce nouveau dispositif que le contexte spécifique du Brexit rend incertains les financements futurs.

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