Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le logement n’est pas un sujet comme les autres. En 2023, chaque Français de métropole ou d’outre-mer doit avoir accès à un logement décent et à un toit, parce que les conditions d’hébergement doivent être dignes dans un pays civilisé.
Débattre du logement ce n’est pas seulement s’intéresser à des murs, c’est également faciliter l’accès à l’emploi ou élever ses enfants décemment, c’est tout simplement poser la question de la dignité. Notre groupe y est très attaché ; nous avons soutenu l’adoption de la proposition de loi visant à lutter contre l’occupation illicite des logements.
Nombre de nos concitoyens tentent d’accéder à la propriété. Tous n’en ont cependant pas les moyens. Le logement constitue l’un des plus importants postes de dépenses des Français, qu’ils soient propriétaires ou locataires. Cette situation rend encore plus insupportable l’exploitation du besoin de logement.
L’habitat indigne est un fléau. Notre collègue Jean-Louis Lagourgue nous propose aujourd’hui de renforcer la lutte contre les logements non décents mis en location.
En l’état actuel du droit, cela a été rappelé, les critères de décence des logements sont fixés par la loi. Il s’agit notamment de la surface et du volume minimum du logement, de l’absence de parasites et de nuisibles. Il s’agit aussi de critères destinés à la protection de la santé de l’occupant, comme une aération empêchant le développement de moisissures ou la protection du logement contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau.
Notre collègue Jean-Louis Lagourgue propose que le loyer d’un logement non décent soit consigné auprès de la Caisse des dépôts et consignations jusqu’à ce que les travaux de conformité soient réalisés.
Le droit actuel prévoit déjà la suspension du versement des aides personnelles au logement (APL) au propriétaire, lorsque les services de la caisse d’allocations familiales (CAF) constatent qu’un logement ne satisfait pas aux critères de la décence.
Aussi, de deux choses l’une : ou bien nous sommes d’accord pour dire qu’un logement mis en location doit satisfaire aux critères de décence fixés par la loi, auquel cas les mesures portées par la proposition de notre collègue ne constituent que la poursuite de la logique qui sous-tend le droit actuel ; ou bien nous considérons qu’un logement non décent peut valablement continuer à être une source de profits pour des bailleurs peu scrupuleux.
« Faire une loi et ne pas la faire exécuter, c’est autoriser la chose qu’on veut défendre », selon le cardinal de Richelieu. Nous pensons donc qu’un logement non décent, c’est-à-dire une mise en location illégale, ne doit pas générer de profit. Le dispositif proposé ne prive que temporairement le propriétaire de ses loyers. Ceux-ci seront en effet consignés jusqu’à la réalisation des travaux de mise en conformité, et c’est à ce moment que les sommes lui seront reversées.
Certains craignent qu’un tel dispositif ne fragilise la situation de petits bailleurs – ils ne sont pas tous petits, loin de là –, mais suffirait-il d’être un petit bailleur pour être exonéré du respect de la loi ? Par ailleurs, en tout état de cause, le propriétaire bailleur conserve toujours la capacité de vendre son bien s’il ne peut en assumer la décence.
Les difficultés qui pèsent sur le logement sont nombreuses, diverses et complexes. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui ne prétend pas toutes les résoudre. Elle a cependant le mérite d’être simple, claire et de saisir à bras-le-corps l’une d’entre elles.
Nous pouvons comprendre la réticence de certains de nos collègues à l’idée de l’appliquer définitivement à l’échelle nationale. Issue d’une proposition déposée à l’Assemblée nationale par un député réunionnais et, au Sénat, par notre collègue Jean-Louis Lagourgue et l’ensemble des sénatrices et sénateurs de La Réunion, cette proposition est néanmoins le signe que l’île rencontre en matière de logement un problème majeur, qui appelle une réponse rapide.
Jean-Louis Lagourgue a déposé un amendement pour que cette proposition de loi ne s’applique qu’à titre expérimental et temporaire sur le territoire de La Réunion.
L’expérimentation permettrait à la fois d’agir rapidement et de recueillir des données utiles au perfectionnement du dispositif. À l’inverse, ne rien faire reviendrait à prendre encore du retard dans un domaine où l’urgence est déjà là. La loi fixe déjà les critères de la décence des logements ; à nous de les faire respecter !