Intervention de Jean-Pierre Decool

Réunion du 16 mars 2023 à 14h30
Lutte contre la désertification médicale des collectivités — Rejet d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, 49 millions d’habitants vivent dans un désert médical, soit 72 % de la population française.

Certes, notre population est vieillissante, mais nous avons formé moins de soignants. Des experts ont pensé faire des économies sur le système de santé, tout en gagnant en innovation et en efficacité.

Au contraire, la gouvernance s’en est trouvée alourdie et a contribué à rigidifier beaucoup de procédures. Le cloisonnement entre l’exercice en libéral et à l’hôpital s’est par ailleurs renforcé.

Les conséquences de cette politique sont bien connues : allongement des délais pour obtenir un rendez-vous, au risque d’une dégradation de l’état de santé du patient, déport des consultations vers les urgences médicales, difficultés, pour le moins, de trouver un médecin traitant et, donc, rupture du parcours et de la permanence des soins, pourtant garantis par la loi…

Si nous partageons ce constat, nous partageons également la responsabilité de résoudre ce problème.

Certaines réponses ont été apportées. Je pense notamment à la création d’une quatrième année d’internat de médecine générale, consacrée à des stages en cabinet médical, en priorité dans les zones médicalement tendues. Cette proposition, formulée initialement par le président Retailleau est de bon aloi et attendue. Toutefois, il nous faut encore en attendre les premiers effets.

Mes chers collègues, cette situation nous oblige à accueillir toute initiative avec responsabilité. Il n’est pas question de se priver d’outils qui se révéleront utiles.

La proposition de loi examinée aujourd’hui est l’un de ces outils. Déposée par notre collègue Dany Wattebled, elle comporte un article unique qui prévoit la mise à disposition d’agents auprès de cabinets médicaux et de maisons de santé par les collectivités territoriales.

En début d’année, lors de ses vœux aux acteurs de la santé, le Président de la République a précisé que « les médecins généralistes doivent pouvoir se concentrer sur la santé, et rien que sur la santé ». Ce texte pourrait permettrait de tendre vers cette ambition.

Toutefois, il n’est pas question de déléguer la gestion administrative des cabinets médicaux aux collectivités territoriales. À cet égard, je tiens à saluer le travail du rapporteur, le docteur Daniel Chasseing qui, fort de sa connaissance du monde médical en milieu rural, a su donner à cette proposition de loi une orientation précise.

Il faut comprendre ce texte comme l’ouverture d’une possibilité pour les collectivités territoriales volontaristes. Il s’agit de leur donner la faculté de mettre à disposition un agent, pendant une courte période, soit trois mois, renouvelable deux fois, auprès d’un cabinet médical ou d’une maison de santé. Le traitement de l’agent sera naturellement remboursé ultérieurement par la structure d’accueil.

Ce dispositif pourrait n’être utilisable que lorsqu’un nouveau médecin arrive, et si celui-ci exerce la mission de service public de permanence des soins.

Ce dernier point est très important. La permanence des soins est au fondement de notre réflexion sur la lutte contre la désertification médicale. Elle doit être l’affaire de toutes et de tous. Les élus locaux souhaitent légitimement pouvoir assurer cette mission de service public sur leurs territoires. Nous devons les accompagner dans cette démarche.

Vous le savez, mes chers collègues, je suis un ardent défenseur de l’initiative parlementaire. Les expériences sur le terrain, en contact direct avec les élus locaux et nos concitoyens, nous conduisent à élaborer et à proposer des évolutions législatives ayant pour objectif de répondre à des difficultés concrètes. Le texte proposé par notre collègue Dany Wattebled s’inscrit dans cet esprit.

J’ai relevé les propos de certains des orateurs m’ayant précédé à cette tribune, notamment lorsqu’ils ont évoqué les compétences et le nécessaire respect de la confidentialité par les personnels des collectivités territoriales. Mes chers collègues, nous leur avons fait confiance quand il s’est agi de mettre en place les agences postales dans une situation similaire ; nous leur avons également fait confiance pour mettre en œuvre nos décisions lorsqu’il s’est agi de lutter contre la covid-19.

Alors, ne manquons pas l’occasion de créer un nouveau levier pour lutter contre la désertification médicale. Le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera naturellement cette proposition de loi !

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