M. Gontard regrettait pour sa part que les revendications des communes, notamment au sujet de leurs spécificités, n’aient pour ainsi dire pas été entendues. « Nous arriverons à l’échéance de 2026 sans être plus avancés », prédisait-il avant de conclure : « Il importait non seulement de laisser ce choix, mais aussi d’apporter une certaine visibilité. » Aurions-nous dit mieux ?
Mes chers collègues, devons-nous nous attendre à un mouvement spontané de communes qui opéreraient ce transfert de compétences avant 2026, alors que rien n’a fondamentalement changé ?
Je crois assez peu aux propriétés du ruissellement. De même, je ne crois ni aux stratégies d’assèchement financier ni au mariage forcé auquel ces dernières sont censées aboutir.
Madame la ministre, les communes n’ayant pas transféré la compétence observent bien la loi. Elles peuvent comme les autres prétendre au concours des agences de l’eau. Les écarter de ces possibilités de subvention pour des motifs – il faut le dire – tatillons ne les conduira pas à déléguer plus vite.
Il en est de même pour les syndicats, qui déplorent ces stratégies punitives. Le risque écologique, s’il faut le prendre, est tout de même une nouvelle dégradation des réseaux et un sous-investissement dangereux qui, tôt ou tard, sera assumé par les intercommunalités. Quant au risque démocratique, c’est celui de la démission des maires.
Les plus petites communautés de communes concernées ne disposent pas davantage des capacités financières nécessaires pour assumer le plein exercice de cette compétence. Certaines d’entre elles ne souhaitent pas s’engager dans une délégation complexe, avec moult frais cachés qui font ployer la barque.
Reconnaissons, moi le premier, que nous devons envisager la question autrement. Nous disposons en effet d’un cadre conceptuel plus souple que nous pouvons faire vivre.
Ce cadre d’action – je vais vous étonner –, c’est la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou loi NOTRe, qui a reconnu l’existence de communautés de communes à partir de 5 000 habitants.
Ce cadre d’action, c’est la loi relative au développement et à la protection de la montagne, dite Montagne, qui nous invite à prendre en compte les aménités des territoires montagneux.
Ce cadre d’action, c’est la différenciation territoriale. Comme le soulignait Jacqueline Gourault, alors ministre de la cohésion des territoires, ce principe est garant d’« un État plus agile, plus réactif et plus proche, qui adapte sa réponse et accompagne main dans la main les initiatives des collectivités ».
Mes chers collègues, n’en avons-nous pas assez de nous gargariser de « logiques ascendantes » sans pour autant les faire vivre quand nous en avons l’occasion ?
Je dois vous le dire : échaudés par les réalités économiques et l’âpreté de leur mission, les élus concernés – maires et conseillers intercommunaux – ne placeront leur confiance dans ce transfert de compétences que s’ils ont l’absolue certitude que cette décision rime avec efficacité et bonne gestion ; que ce transfert sera pris dans l’intérêt de leur commune et leurs administrés ; et qu’il n’engendrera pas une augmentation inconsidérée des coûts et du prix de l’eau, dans le contexte d’une forte inflation que beaucoup peinent à supporter.
Madame la ministre, nos élus de proximité sont parfaitement conscients de leur grande responsabilité en la matière.
Votre collègue Christophe Béchu nous rappelait récemment que la nature ne nous laisse pas le choix. C’est vrai : face à une sécheresse structurelle, la réponse ne sera pas uniforme ; elle sera collective.