Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte dont nous débattons aujourd’hui vise à faire figurer de nouveau les compétences eau et assainissement dans la liste des compétences facultatives des communautés de communes.
J’aurais aimé faire une synthèse des propos tenus par notre collègue Sueur et par les autres orateurs, mais je dois avouer que le débat au sein du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a été assez animé.
Les questions de l’eau et de l’assainissement sont centrales. La présente proposition de loi interroge la capacité des communes à choisir de transférer ou non les compétences eau et assainissement à l’intercommunalité, ce qu’une précédente loi avait rendu obligatoire.
Par respect du principe de subsidiarité, nous jugeons légitime que des élus puissent librement choisir de mettre en commun, ou non, les compétences eau et assainissement et décider des modalités de cette mise en commun selon les particularités de leur territoire.
En matière de gestion de l’eau, les questions relatives à la géographie et aux capacités techniques se posent nécessairement.
Souvent, le périmètre administratif de l’intercommunalité ne se superpose pas à la réalité hydrique du territoire. Je pense notamment aux territoires ruraux et aux territoires de montagne, pour lesquels le transfert de ces compétences peut ne pas être opportun.
Cette proposition de loi a le mérite de faire véritablement confiance aux élus locaux. Elle leur laisse une liberté de choisir, « à la carte », la manière dont ils veulent gérer l’eau et l’assainissement : ensemble ou seuls, une compétence sans l’autre ou les deux en même temps.
Il faut toutefois admettre que l’intercommunalité permet d’envisager des projets plus ambitieux et de mutualiser les coûts et les risques pour mieux investir face aux enjeux environnementaux croissants.
Car oui, la multiplication des épisodes de chaleur et de sécheresse nécessitera de plus en plus de mises en commun pour éviter les conflits d’usage autour de l’eau.
À ce titre, je souhaite revenir sur la question centrale qui se posera à l’avenir. On a longtemps cru, en France, que l’accès à l’eau serait garanti à tous et pour tous les usages. Cette affirmation n’est plus d’actualité : nous avons connu des sécheresses estivales redoutables, et nous connaissons aujourd’hui des sécheresses hivernales dont la réalité brutale annonce de nouveau des étés difficiles.
L’été 2022 nous a bien montré que l’accroissement du nombre des épisodes de canicule et de sécheresse a des conséquences directes sur l’eau potable et sur l’assainissement. Ceux qui s’en sortent bien aujourd’hui de façon isolée s’en sortiront-ils toujours aussi bien demain ?
Quelque 90 % des cours d’eau étaient en grand déficit cet été – les gorges du Verdon et le lac de Serre-Ponçon étaient complètement à sec – et une centaine de collectivités ont été privées d’eau potable, ce qui a rendu nécessaire l’acheminement d’eau par camions-citernes et la distribution de millions de bouteilles.
À l’aune de ces crises, on comprend que la présente proposition de loi ne constitue pas une solution en soi pour répondre à ces enjeux locaux, car aucune collectivité ne s’en sortira seule.
Que l’on se place à l’échelle communale ou intercommunale, le problème demeure le même. Aujourd’hui, la politique de l’eau est sous-financée dans une fourchette de 800 millions à 3 milliards, voire 4 milliards d’euros par an. On est loin du compte !
Les réseaux, souvent vieillissants et usagés, ont besoin d’être rénovés. Les canaux sont vétustes au point que 20 % de l’eau produite disparaît dans les sous-sols avant d’atteindre un robinet.
C’est aussi un enjeu social fort, car l’inflation et le sous-investissement gonflent et gonfleront les prix de l’eau au détriment des usagers. Aujourd’hui, 1 million de foyers sont déjà concernés par une facture d’eau d’un montant supérieur à 3 % de leurs revenus.
Si l’on peut soutenir l’intelligence des élus territoriaux et respecter leur faculté de faire les meilleurs choix pour leur commune, on peut aussi souligner la nécessité de mutualiser et d’investir collectivement.
Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires se partagera sur ce texte entre quelques votes pour et une majorité d’abstentions, mes collègues estimant que cette proposition de loi n’est pas la réponse aux problèmes évoqués.