Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je remercie tout d’abord le groupe du RDSE, ainsi que Bernard Fialaire, auteur et rapporteur de cette proposition de loi. Ils ont pointé un véritable sujet dont nous devions nous saisir : les fraudes en matière artistique.
Le phénomène n’est pas nouveau. En 1895, déjà, le sénateur Agénor Bardoux intervenait dans cet hémicycle, à la suite de l’achat par Alexandre Dumas fils d’un paysage portant la signature de Corot, alors qu’en réalité il avait été peint par un artiste bien moins renommé de l’école de Barbizon, Paul-Désiré Trouillebert.
Ce scandale a abouti à la loi Bardoux, qui, depuis sa promulgation en 1895, n’a jamais été modifiée et continue d’être appliquée par les juges.
Toutefois, on constate ces dernières années une multiplication des fraudes en matière artistique, ainsi qu’une augmentation considérable des transactions illicites.
Face à ces dernières, cette proposition de loi pointe à juste titre les insuffisances des dispositions juridiques de la loi Bardoux, qui est aujourd’hui obsolète au regard des exigences de notre temps en matière de lutte contre la fraude artistique.
Cette loi est obsolète, car son champ d’application est trop restrictif pour couvrir toute l’étendue des faux dans leur réalité actuelle. Elle ne vise en effet que les arts existant à la Belle Époque tels que la peinture, la sculpture, le dessin, la gravure ou la musique, alors que de nouvelles formes artistiques – photographie, arts décoratifs ou encore arts numériques – se sont développées et ne cessent de se développer depuis.
Cette loi est obsolète, car elle ne prend en considération que les faux en signature et vise exclusivement les œuvres protégées par le droit d’auteur, alors que les œuvres tombées dans le domaine public constituent une part importante des affaires de fraude.
Cette loi est obsolète, enfin, car l’échelle des peines n’est plus en adéquation avec les infractions similaires, comme les délits de contrefaçon ou de faux et d’usage de faux. Comme le souligne justement la proposition de loi, le recours aux dispositifs existants, comme ceux qui sont prévus pour lutter contre l’escroquerie, le faux, la tromperie ou la contrefaçon, est impossible, car ces derniers ne sont pas tout à fait adaptés à la situation particulière des fraudes artistiques.
Madame la ministre, les auteurs et leurs ayants droit, les acheteurs – amateurs d’art ou investisseurs –, les professionnels du marché de l’art, ainsi que les institutions dont l’activité se trouve parasitée, sont ainsi dans l’attente d’une réforme.
À ce besoin criant d’actualisation de la loi, ce texte apporte une réponse nécessaire et attendue.
Cependant, si les insuffisances de la loi Bardoux sont connues, sa réécriture s’annonçait particulièrement complexe.