Ma question s’adresse à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.
Monsieur le ministre, dans une démocratie parlementaire normale, aujourd’hui serait la journée de l’apaisement.
Après des années de négociation avec les partenaires sociaux et toutes les forces politiques, un consensus sur l’avenir du travail et de notre système de retraites aurait été trouvé et une réforme des retraites serait en voie d’être adoptée largement et paisiblement. Tel est le modèle décisionnel qui règne dans tous les pays européens que vous aimez tellement prendre en exemple.
Mais pas ici – parce qu’ici, c’est la France !
Ici, le Gouvernement aime avoir raison tout seul, en n’écoutant personne et en agissant contre tout le monde. Qu’importe que personne ne soit d’accord avec lui !
En effet, personne, monsieur le ministre, sinon une partie des Républicains, n’est d’accord avec vous. Vous êtes tout seul : 75 % de la société française rejettent cette réforme, 93 % des actifs y sont opposés, aucun syndicat ne la défend. La majorité parlementaire elle-même est incertaine.
Alors que les Français sont encore massivement dans la rue, sept députés – qui n’ont ni voté ni examiné le texte – et sept sénateurs – auxquels le Gouvernement a imposé un vote bloqué – ont décidé à huis clos de prendre deux ans de repos aux plus précaires.
Quant à vous, vous hésitez entre une majorité de quelques voix, arrachée contre un pays transformé en poudrière, ou l’utilisation du 49.3, c’est-à-dire l’adoption sans vote d’une réforme minoritaire.
Ces deux options, monsieur le ministre, sont une folie.
Ce n’est pas parce que des outils sont légaux que leur utilisation est légitime. Ce n’est pas parce que des procédés sont constitutionnels qu’ils répondent aux standards démocratiques modernes des démocraties dignes de ce nom.
Arrêtez les frais ! À ce niveau de tension sociale et démocratique, l’urgence, ce n’est plus d’adopter cette réforme des retraites, c’est de sortir de ce fonctionnement mortifère et d’organiser démocratiquement la transition vers une République véritablement parlementaire.