Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 15 mars 2023 à 15h00
Défense extérieure contre l'incendie et territoires ruraux — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous examinons la proposition de loi visant à adapter la défense extérieure contre l’incendie à la réalité des territoires ruraux. Je remercie le groupe Union Centriste d’avoir demandé son inscription dans l’espace qui lui est réservé.

Ce texte est le fruit des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, engagés à la demande du président du Sénat, qui a considéré qu’il n’était pas normal que la quasi-totalité du budget d’investissement d’une commune soit consacrée à la défense extérieure contre l’incendie, quelle que soit l’importance de celle-ci.

Ces travaux, menés avec mon collègue Franck Montaugé, que je salue, ont abouti à la publication au mois de juillet 2021 du rapport d’information Défense extérieure contre l ’ incendie : assurer la protection des personnes sans nuire aux territoires.

Le 5 janvier 2022 a eu lieu en séance publique un débat sur les conclusions de ce rapport d’information, organisé à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, présidée Françoise Gatel, également auteur de cette proposition de loi, que je tiens à remercier de son appui tout au long de nos travaux.

Au cours de ce débat, nous avons malheureusement constaté à quel point le Gouvernement n’était pas conscient de la situation et de ses conséquences sur un grand nombre de territoires ruraux. Ce constat nous a conduits à déposer la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui.

Sur notre initiative, l’article 32 de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite 3DS, a prévu que le Gouvernement remette un rapport d’évaluation de l’impact de la défense extérieure contre l’incendie sur les communes avant le 1er juillet 2022.

Si celui-ci n’a pas été formellement remis par le Gouvernement, comme le prévoit la loi, ce qui est quelque peu surprenant, une copie datée de juin 2022 m’en a été transmise récemment, à la demande du cabinet du ministre de l’intérieur. Nous nous félicitons que ce document confirme une très grande partie des conclusions auxquelles Franck Montaugé et moi-même sommes arrivés, même si, curieusement, il a été élaboré sans aucune consultation des maires, mais uniquement à partir de celle des préfets.

Il est tout d’abord nécessaire de rappeler que la loi du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, dite Warsmann, a substitué à la réglementation nationale en matière de défense extérieure contre l’incendie le principe d’une réglementation départementale établie par le préfet en concertation avec les élus locaux, l’objectif étant de mieux répondre aux spécificités des différents territoires que ne peut le faire une réglementation nationale.

Comme le souligne l’excellent rapport de notre collègue Loïc Hervé, au nom de la commission des lois, que je tiens à remercier de la qualité de nos échanges et de son travail, cette réforme était attendue de longue date par les élus et les parlementaires. Malheureusement, près de douze ans après son adoption, force est de constater que cette loi n’a pas répondu à leurs attentes et à la volonté du législateur quant à l’adaptation des règles à la réalité des territoires.

Au contraire, elle a provoqué dans un certain nombre de départements un fort mécontentement des maires, qui résulte de la mise en application très inégale et, souvent, très insatisfaisante de la concertation prévue par le décret de 2015. Selon l’enquête que nous avons menée, 70 % des maires estiment en effet que la concertation n’a pas été satisfaisante.

Un autre aspect insatisfaisant de la réforme est l’absence d’évaluation de la mise en œuvre à l’échelon local des règles de défense extérieure contre l’incendie. Celles-ci ont pu, en effet, être élaborées sans considération de leurs conséquences, notamment financières, pour les communes chargées de leur application.

Il en résulte que ces règlements ne répondent pas toujours, ou insuffisamment, aux spécificités infradépartementales et ne sont pas proportionnés à la réalité des risques.

Dans le département de l’Eure, que j’ai l’honneur de représenter, cela a conduit à édicter une règle particulièrement stricte d’une distance de deux cents mètres entre les habitations et l’installation d’un point d’eau incendie sur l’ensemble du territoire, en zone urbaine comme en zone rurale, alors que le risque en matière de propagation n’est évidemment pas le même.

Comme l’indique le rapport du Gouvernement, « il n’est pas concevable de demander à des communes peu peuplées de disposer d’une couverture de défense extérieure contre l’incendie (Deci) identique à celle des communes urbaines ». Pourtant, cela peut être le cas – je sais de quoi je parle !

Le rapport va plus loin, en indiquant que ces règlements devraient même envisager l’absence de couverture plutôt qu’« une Deci coûteuse et pénalisante pour assurer la couverture incendie d’un bâti à risque très faible ».

Ces règles disproportionnées ont des conséquences particulièrement préjudiciables sur les finances des communes. Ce sont en effet parfois des investissements de plusieurs centaines de milliers d’euros qui sont nécessaires pour de toutes petites communes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion