Intervention de Monique de Marco

Réunion du 15 mars 2023 à 15h00
Défense extérieure contre l'incendie et territoires ruraux — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Monique de MarcoMonique de Marco :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans son dernier bulletin, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) alerte sur le faible niveau de nos nappes phréatiques : 80 % d’entre elles auraient un niveau inférieur à la moyenne et 45 % ont rejoint – et c’est inquiétant – le niveau « bas », voire « très bas ».

Depuis l’automne, en effet, les pluies ont été insuffisantes pour reconstituer ces nappes.

La situation ne va pas s’améliorer d’ici au printemps et au renouveau végétal, sans que l’on puisse compter sur la contribution hydrique du manteau neigeux dans les Pyrénées, qui est trop faible. Fait nouveau, cette situation touche l’ensemble du territoire et laisse augurer un été 2023 encore plus sec que le fut l’été 2022, et ce dans toutes les régions.

Ce n’est pas sans incidence sur le risque incendie dans les espaces naturels, mais également dans les communes bordant ces espaces. En Gironde, nous en avons fait la douloureuse expérience l’été dernier. Dans ce contexte, l’importance de la défense extérieure contre l’incendie doit être réaffirmée.

C’est dans cet état de vigilance que nous abordons l’examen de cette proposition de loi visant à adapter la défense extérieure contre l’incendie à la réalité des territoires ruraux.

Il est vrai que, depuis sa modification par la loi du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, l’application du nouveau cadre de la Deci n’est pas satisfaisante. Le rapport d’information de 2021 souligne la faible mise en conformité des communes à la loi, faute de schémas communaux nécessaires.

Cela est dû au déficit de concertation observé au moment de l’élaboration des règlements départementaux de défense extérieure contre l’incendie, mais aussi, et surtout, au coût de la mise en conformité, comme le rapport d’information le démontre largement. Il est indéniable que, pour de nombreuses petites communes, la création ou l’entretien des bouches d’incendie constitue une charge exorbitante, s’ajoutant à celle de l’entretien des canalisations d’eau courante auxquelles ces bouches sont rattachées.

Ce texte n’offre pourtant aucun instrument financier aux communes. Nous considérons, pour notre part, qu’un plan national d’accompagnement financier devrait être mis en place pour répondre à cette problématique transversale de la compétence communale de l’eau. Sans cela, toute initiative semble vaine. Je ne vous ai pas entendue, madame la ministre, mentionner ce sujet précis dans les propositions que vous avez avancées…

En définitive, l’efficacité des mesures proposées par nos collègues de l’Union Centriste pour améliorer l’application de la Deci dans tous nos territoires est très difficile à évaluer.

D’un côté, la clarification des procédures de concertation, la création d’une commission consultative dédiée et l’obligation d’information des communes en amont de l’adoption de réglementations départementales vont évidemment dans le bon sens et permettront de mieux accompagner les maires.

De l’autre, les dispositions qui permettent aux communes rurales de déroger aux normes de sécurité aujourd’hui prévues par le référentiel national risquent de faciliter la délivrance de permis de construire en zones non sécurisées, donc l’étalement urbain. Ce référentiel fixe les besoins objectifs en points d’eau et bouches d’incendie pour les pompiers. L’introduction de dérogations territoriales ne risque-t-elle pas d’affaiblir les capacités d’action de ces derniers ?

Quel est par ailleurs le sens de la création d’évaluations préalables des coûts financiers, urbanistiques et de développement économique, si ce n’est de justifier les dérogations pour les communes aujourd’hui moins exposées au risque incendie ? Celles-ci seront-elles à l’abri demain ? Cette solution reportant la charge sur les générations futures, nous avons déposé un amendement pour clarifier la mesure.

Dans l’intérêt des communes, nous proposerons enfin une nouvelle piste pour alléger leurs charges. Il s’agirait, comme le proposait d’ailleurs le rapport d’information, de dresser l’inventaire de tous les points d’eau incendie privatifs pour les intégrer aux schémas communaux et les substituer à des bornes communales. Cela permettrait d’intégrer les piscines privées ou toute étendue d’eau non potable, à condition que cela ne porte pas atteinte aux réserves de nos précieuses nappes phréatiques.

Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons de voter le texte.

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