Intervention de Jean-Michel Arnaud

Réunion du 15 mars 2023 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 23 et 24 mars 2023

Photo de Jean-Michel ArnaudJean-Michel Arnaud :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je concentrerai mon propos sur les volets relatifs à la compétitivité et à l’énergie inscrits à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil.

La crise énergétique a affecté la balance commerciale de la quasi-totalité des pays de l’Union européenne. En France, son déficit s’établit à 164 milliards d’euros en 2022.

Les subventions massives aux technologies vertes de l’IRA américain laissent craindre une nouvelle perte de compétitivité de l’Europe vis-à-vis des États-Unis. Le 8 février dernier, le Sénat a ainsi consacré un débat d’actualité à la question suivante : « Quelle réponse européenne aux récentes mesures protectionnistes américaines ? »

Madame la secrétaire d’État, comment éviter un détournement de l’investissement européen vers les États-Unis ? Faut-il ouvrir la voie à de nouveaux financements pour nos industries vertes ou miser sur le renforcement d’enveloppes existantes, comme le Fonds européen de développement régional (Feder) ?

Par ailleurs, le récent renchérissement du dollar vis-à-vis de l’euro semble représenter une occasion de relance pour la politique industrielle européenne, dès lors qu’il est porteur de gains de productivité et de compétitivité pour nos entreprises exportatrices.

Comment éviter, toutefois, une course aux subventions entre États membres, qui fragiliserait les règles de concurrence équitable sur lesquelles est bâti le marché unique ?

La dégradation du solde de notre balance commerciale procède principalement de la dépendance de l’Union européenne à l’égard des énergies fossiles. Il convient de prendre les mesures nécessaires au renforcement de la souveraineté énergétique du continent.

Je salue le fait que, depuis peu, les plans nationaux de relance et de résilience peuvent comprendre un chapitre REPowerEU, qui leur permettra d’accéder aux 20 milliards d’euros – dont 2, 32 milliards pour la France – de subventions supplémentaires prévues par ce plan européen. Je m’interroge cependant sur la possibilité accordée aux États membres de puiser dans les fonds de réserve de la politique de cohésion à hauteur de 7, 5 % du Feder.

Cela ne risque-t-il pas de priver nos régions de financements essentiels à leur développement économique ? Madame la secrétaire d’État, des mécanismes de compensation du manque à gagner pour nos territoires sont-ils envisagés ? De manière générale, il est regrettable que les collectivités aient été tenues à l’écart de l’élaboration des plans de redressement et de résilience nationaux.

Je note pourtant que ces plans doivent désormais contenir une synthèse du processus de consultation des autorités locales et régionales. Comment garantir que leurs besoins soient réellement pris en compte dans le texte final ?

Je souhaite par ailleurs vous interpeller sur la feuille de route qu’a présentée hier Mme Kadri Simson, commissaire européenne à l’énergie, devant le Parlement européen. Trois mesures principales ont été annoncées.

Premièrement, la réforme proposée maintient le système du merit order, selon lequel la dernière unité de production électrique appelée fixe les prix. L’exécutif européen n’a pas accédé à la demande française d’un découplage total entre le gaz et l’électricité.

Deuxièmement, pour les nouveaux investissements dans le bas-carbone, quand un financement public est nécessaire, la Commission plaide pour le recours à des contrats pour la différence, ce qui représenterait une opportunité pour nos investissements dans le nucléaire.

Troisièmement, la proposition oblige également les États membres à établir des fournisseurs en dernier ressort afin qu’aucun consommateur ne se retrouve privé d’électricité, et vise de plus à renforcer la capacité de surveillance de l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie (Acer) et des régulateurs nationaux.

Madame la secrétaire d’État, quelle sera la position de la France dans les négociations à venir sur ce sujet particulièrement sensible pour les industries, les entreprises et les consommateurs ?

Je souhaite également évoquer le plan des mobilités. L’Allemagne vient de surprendre ses partenaires en s’opposant à un texte européen censé exiger la vente de véhicules uniquement électriques à partir de 2035. Ce faisant, elle a entraîné dans son sillage plusieurs pays d’Europe centrale, dont la Hongrie, dans lesquels l’industrie automobile est puissante et représente une part importante de l’économie.

Cette décision doit nous amener à réfléchir à des alternatives au tout électrique qui nous permettraient de nous détacher des énergies fossiles sans pour autant imposer une technologie précise aux industriels.

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