Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons vise à mieux protéger les enfants victimes de violences intrafamiliales. Le 9 février dernier, elle a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale. Le Gouvernement n’a pas engagé la procédure accélérée sur ce texte, car il traite d’un sujet sensible, celui de la protection de l’enfance, qui requiert que toutes les précautions soient prises par le législateur.
Nous constatons que cette proposition de loi a fait l’objet de modifications lors de chaque lecture, depuis son dépôt jusqu’à son examen aujourd’hui en séance publique par notre assemblée. Elle s’inscrit dans la droite ligne de la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille.
Ce texte a introduit dans notre droit une distinction entre le retrait de l’autorité parentale et celui de l’exercice de l’autorité parentale.
Il vise à élargir le mécanisme de suspension provisoire de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale dans le cadre des procédures pénales, et à rendre plus systématique le prononcé du retrait de l’autorité parentale par les juridictions pénales en cas de crime commis sur la personne de l’enfant ou de l’autre parent ou d’agression sexuelle incestueuse.
Depuis 2016, le nombre de cas de violences intrafamiliales ne cesse d’augmenter.
En 2019, 44 % des plaintes pour violences physiques et sexuelles enregistrées par les services de sécurité concernaient des violences commises au sein de la famille. Un pic a été atteint en 2020 en raison du confinement, mais la tendance à la hausse ne semble pas fléchir, comme le prouvent les chiffres enregistrés depuis 2021. La libération de la parole et l’encouragement à signaler toutes les formes de violences intrafamiliales ont sans aucun doute contribué à cette augmentation.
Ces chiffres effrayants, derrière lesquels il convient de mettre des visages, nous obligent, en notre qualité de législateur, à agir : il s’agit pour nous d’enrayer ce phénomène.
Je tiens à saluer le travail minutieux de réécriture effectué par notre rapporteur, Marie Mercier, qui maîtrise parfaitement ces mécanismes juridiques complexes, et qui a déjà beaucoup œuvré sur le sujet des violences conjugales et intrafamiliales. Je la rejoins dans son choix de limiter son intervention à quelques ajustements, en se concentrant sur l’amélioration des dispositifs que sont la suspension provisoire de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et le retrait de cette autorité par les juridictions pénales.
Le respect des principes généraux du droit, constitutionnels et conventionnels, que sont la présomption d’innocence, l’intervention nécessaire du juge appréciant in concreto l’intérêt de l’enfant, le droit à une vie familiale et privée normale, a très nécessairement guidé le travail de la commission des lois.
J’ajoute que les amendements adoptés en commission ont permis de rationaliser et de mettre en cohérence le droit civil avec le droit pénal.
Ainsi, à l’article 1er, le dispositif adopté par la commission réserve l’extension de la suspension de plein droit de l’exercice de l’autorité parentale et des droits de visite et d’hébergement aux cas les plus graves, ceux de crime ou d’agression sexuelle incestueuse sur la personne de l’enfant. Cette disposition permettra de suspendre en urgence, avant tout jugement, l’exercice de l’autorité parentale d’un parent mis en cause commission des infractions les plus graves sur son enfant, le temps qu’un juge se prononce.
La commission a considéré qu’une suspension automatique, tout le temps de la procédure – comme on le sait, celle-ci peut durer des années –, était disproportionnée au regard de la présomption d’innocence et du droit de chacun de mener une vie normale.
L’article 2 prévoit de faire un principe du retrait total de l’autorité parentale en cas de crime ou d’agression sexuelle incestueuse sur l’enfant ou de crime sur l’autre parent.
Enfin, l’article 3 contribuera à rendre plus cohérentes et effectives les mesures figurant dans cette proposition de loi.
Ainsi modifié par la commission des lois, le texte améliore les dispositifs juridiques existants, afin de garantir une meilleure protection des enfants victimes de parents violents. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera naturellement cette proposition de loi.