J'évoquerai le problème à travers le prisme de personnes souffrant de maladies rares, voire très rares - celles qui touchent moins de 2 000 personnes. Environ 7 000 maladies rares ont été identifiées ; 85 % d'entre elles concernent moins d'une personne sur un million. Néanmoins, compte tenu du nombre important de maladies rares, un Français sur vingt est concerné, soit trois millions de personnes.
Or 95 % des personnes souffrant d'une maladie rare ne disposent d'aucun traitement spécifique pour se soigner et changer significativement le cours de leur pathologie. Depuis quelques années, les traitements fondés notamment sur la génothérapie se multiplient, mais soigner 7 000 maladies rares reste un immense défi. Et si les avancées scientifiques sont enthousiasmantes, les perspectives commerciales le sont beaucoup moins. Non seulement les prix de ces nouveaux traitements sont très élevés, mais l'absence de modèle économique ne permet pas toujours leur développement.
Les évolutions récentes sont inquiétantes. Nous observons un retournement des marchés financiers pour les maladies « ultra-rares » : les industriels cessent d'investir dans des traitements adaptés à ces pathologies, qui leur permettaient par ailleurs de maîtriser des technologies utiles pour soigner des maladies plus fréquentes, assurant la rentabilité des sommes engagées. De plus, certains laboratoires ont retiré leurs traitements du marché européen pour se recentrer sur le marché américain, alors qu'ils avaient obtenu les autorisations de mise sur le marché (AMM) nécessaires pour traiter des maladies graves excessivement rares. On peut citer un autre médicament de Bluebird Bio, le Skysona, destiné aux enfants atteints d'adrénoleucodystrophie. C'est d'autant plus choquant que ces deux produits étaient issus de la recherche académique française. Il est primordial d'inventer un nouveau modèle permettant un accès non pas aux marchés, mais aux patients souffrant de ces maladies « ultra-rares ».