Intervention de Stéphane Sajoux

Mission d'information Bâti scolaire — Réunion du 21 mars 2023 : 1ère réunion
Entreprises du bâtiment et du paysage — Audition de Mm. Stéphane Sajoux président du groupe performance énergétique de la fédération française du bâtiment ffb président de la ffb île-de-france est david morales vice-président la confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment capeb en charge des affaires économiques et alain chouguiat directeur du pôle économique de la capeb et jean-marc delpeyroux membre de la commission technique l'union nationale des entreprises du paysage

Stéphane Sajoux, président du groupe Performance énergétique de la Fédération française du bâtiment, président de la FFB Île-de-France :

Merci pour votre invitation. J'interviens ici au nom de la Fédération française du bâtiment et également avec deux autres « casquettes » qui peuvent vous apporter un éclairage intéressant. En effet, la FFB Île-de-France que je préside a signé une convention avec l'Association des maires de France de Seine-et-Marne pour accompagner les élus dans la rénovation énergétique des bâtiments scolaires de ce département. À titre privé, je suis également en charge de la construction d'un établissement scolaire de 1 500 élèves dans le Val-de-Marne dans lequel nous déployons la rénovation énergétique et de bâti.

En réponse à votre question, je rappelle que nous avons déjà embauché dans le secteur du bâtiment 100 000 voire 120 000 personnes pour relever le défi de la rénovation énergétique, à commencer par toutes ses composantes financées par MaPrimeRénov'. Or nous constatons aujourd'hui que certaines commandes s'épuisent et qu'apparaissent des difficultés sur certains marchés. Par conséquent, en termes de volumétrie, de maillage du territoire et de capacité d'intervention sur le bâti scolaire, nous ne voyons pas de problème majeur. En revanche un certain nombre de freins peuvent subsister, en particulier dans le format et l'attribution des marchés qui pourraient être trop contraignants pour permettre à certaines entreprises de candidater.

Pour nos entreprises qui doivent recentrer leur activité sur le bâti scolaire, c'est principalement une question de tempo, sachant que les compétences sont bien présentes. Les enjeux sont importants, avec beaucoup de travaux à réaliser : c'est pourquoi, en termes de massification, j'attire votre attention sur la présence sur l'ensemble du territoire d'un maillage important d'entreprises disponibles à proximité pour répondre à cette demande en termes de volume et de compétence.

J'ouvre une parenthèse : sur le terrain, on constate qu'avant la phase de rénovation du bâti, un certain nombre d'étapes techniques préalables sont nécessaires. Elles sont principalement requises, en matière de performance énergétique, par le décret dit « tertiaire » et le décret « BACS » (Building Automation & Control Systems ou décret n° 2020-887 du 20 juillet 2020 relatif au système d'automatisation et de contrôle des bâtiments non résidentiels et à la régulation automatique de la chaleur). En fonction de leur surface, un certain nombre d'établissements scolaires entrent dans le champ de cette réglementation. Les premiers gestes à mettre en place relèvent ici du pilotage et du « comptage d'usage » pour se donner les moyens d'identifier dans quelle mesure on doit intervenir sur le bâti, sur les usages ou paramétrer les installations de chauffage afin de mieux les adapter au temps scolaire, limiter les déperditions ainsi que le gaspillage énergétique. Ce processus technique d'approche par étapes montre ainsi que la rénovation énergétique ne se limite pas au bâti et qu'il ne suffit pas, par exemple, de remplacer les fenêtres, de modifier les façades ou d'améliorer l'isolation.

L'autre sujet, qui s'invite tout particulièrement à propos des locaux scolaires, est assez technique et je l'illustrerai de façon simple : dans la phase de Covid, on a observé que des établissements neufs à très haute performance énergétique avaient eu, en pratique, beaucoup de mal à se chauffer parce qu'il fallait ouvrir les fenêtres au moins une demi-heure à intervalles réguliers pour reventiler les salles de classe. Puis, cet hiver, on a vu des installations qui avaient du mal à poursuivre la régulation du chauffage. Tout ceci démontre clairement la nécessité de prendre en compte la question essentielle de la ventilation dans les travaux portant sur les établissements scolaires. Je rappelle que le besoin de renouvellement d'air est très important dans les salles de classe : elles sont occupées par une trentaine d'élèves ainsi qu'un professeur et il faut veiller à limiter le taux de CO2. De plus, la pratique d'ouverture des fenêtres va devoir se poser de manière différente et des travaux doivent améliorer la ventilation, en ayant recours, autant que faire se peut, à des systèmes simples pour éviter des contraintes de maintenance importantes. Je signale également le problème de la dérive des températures : dans le passé, les températures commençaient à monter au mois de juillet au moment des vacances estivales ; or de plus en plus, et tel a été le cas l'année dernière, les températures augmentent dès le mois de mai ou juin avec des élèves qui sont encore dans l'établissement scolaire. Vous voyez donc que la réflexion sur la partie rénovation thermique ne doit pas se limiter au volet chauffage, mais doit aussi englober la température de confort pendant l'été. Ces sujets techniques doivent être pris en compte pour appréhender la volumétrie et l'action de nos entreprises dans le bâti scolaire.

S'agissant des marchés, il va falloir bien encadrer et préparer les conditions d'attribution des marchés publics ainsi que le type de marché. J'appelle à une grande méfiance à l'égard des contrats de performance énergétique (CPE) qui peuvent avoir comme conséquence automatique d'écarter les entreprises locales compétentes et disponibles pour travailler sur le terrain, mais qui n'auront pas une surface financière, une approche ou une structure juridique suffisantes pour s'engager directement sur des CPE. On risquerait donc de réinviter, sur de tels marchés, les très grands opérateurs disposant des moyens financiers et les couvertures assurantielles requises, mais qui devront faire appel à la sous-traitance, ce qui complique la réalisation des marchés.

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