Intervention de Évelyne Renaud-Garabedian

Réunion du 4 avril 2023 à 14h30
Résidence d'attache pour les français établis hors de france — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Évelyne Renaud-GarabedianÉvelyne Renaud-Garabedian :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’entamerai mon propos en rappelant un chiffre que je répète régulièrement : 3, 5 millions de Français résident à l’étranger, soit un nombre supérieur à la population des cinq départements d’outre-mer réunis. Beaucoup d’entre eux restent propriétaires d’une résidence en France.

Ils sont propriétaires d’une maison de famille ou disposent d’un pied-à-terre lorsqu’ils sont de passage en France ou quand leurs enfants viennent y faire leurs études. Il s’agit pour eux d’un refuge quand la situation sécuritaire s’aggrave dans leur pays de résidence ou quand une catastrophe naturelle y survient. Il s’agit parfois simplement de leur résidence principale qu’ils retrouvent lorsqu’ils rentrent définitivement en France, comme beaucoup l’ont d’ailleurs fait lors de la crise sanitaire.

Dès qu’ils quittent la France, leur résidence principale n’est plus qu’une résidence secondaire, qualification étonnante puisqu’il s’agit de leur unique résidence en France.

Ces Français sont redevables de la taxe d’habitation sur cette résidence dite « secondaire » et, dans certains cas, de la taxe sur les logements vacants. En outre, ils n’ont pas droit au dispositif MaPrimeRénov’.

Depuis plus de quinze ans, comme l’ont rappelé mes collègues, la création d’un statut de résidence d’attache ou de résidence de repli est une promesse qu’ont faite, mais jamais tenue, plusieurs candidats à l’élection présidentielle.

Aujourd’hui, nous examinons la proposition de loi de notre collègue Ronan Le Gleut, qui prévoit de faire de la résidence secondaire des Français de l’étranger une résidence d’attache et de les exonérer de la taxe d’habitation, sous certaines conditions.

Sur le fond, je ne peux que partager les visées de la proposition de loi de notre collègue ; sur la forme, j’émets des réserves sur le dispositif retenu.

Le texte ne crée pas, à mon sens, un statut distinct pour les biens détenus en France par les Français de l’étranger, il les classe dans une catégorie déjà existante, celle des résidences secondaires. Dès lors, introduire un traitement fiscal différent entre deux résidences secondaires, selon le lieu de vie de son propriétaire, soulève, selon moi, un risque d’inconstitutionnalité fort, qu’il faut à tout prix éviter.

Le texte revu par la commission des finances ne prévoit le dégrèvement de la taxe d’habitation que pour les Français contraints de venir résider dans leur résidence d’attache en France pour des motifs extérieurs à leur volonté et pour assurer leur sécurité.

Si cette exonération est la bienvenue, elle n’est que marginale. Elle n’est prévue que pour le temps que la situation se stabilise dans leur pays de résidence. Elle ne répond donc pas à la problématique de la résidence unique détenue par les Français de l’étranger.

Avant d’envisager toute disposition fiscale particulière, il faut selon moi introduire une nouvelle notion en droit fiscal et créer une catégorie de résidence qui ne s’appuie ni sur la définition d’une résidence principale ni sur la notion de résidence secondaire. Je précise d’ailleurs qu’il n’existe pas réellement en droit fiscal de définition de la résidence secondaire : est considérée comme secondaire toute résidence qui n’est pas principale.

Le bénéfice de la résidence « de repli », « d’attache » ou « intermittente » – le nom reste à trouver – pourra être conditionné soit à l’inscription des Français sur le registre consulaire, soit à la détention précédemment d’une résidence principale en France pour les personnes de nationalité étrangère qui y ont vécu et y conservent un bien.

Le ministre Olivier Becht a annoncé un projet de loi allant dans ce sens, ainsi que la création d’un groupe de travail qui, je l’espère, monsieur le ministre, réunira aussi bien des parlementaires que les conseillers de l’Assemblée des Français de l’étranger qui travaillent sur ce thème très important depuis de nombreuses années.

Pour les Français de l’étranger, ce sujet n’est pas purement un problème fiscal : il est aussi symbolique et marque leur attachement inaliénable à la France.

Dans tous les cas, je voterai pour cette proposition de loi, qui constitue une étape indispensable dans la construction d’un consensus parlementaire. Je reste convaincue qu’un nouveau statut conforme à la Constitution et au droit européen devrait être créé.

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