Intervention de Monique de Marco

Réunion du 4 avril 2023 à 14h30
Lutte contre le risque incendie — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Monique de MarcoMonique de Marco :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, Belin-Béliet, Hostens, Louchats, La-Teste-de-Buch, Saumos, Origne, Landiras : voilà une liste non exhaustive des nombreuses communes meurtries par les flammes l’été dernier. Au total, 30 000 hectares de forêts sont partis en fumée en Gironde et plus de 60 000 hectares en France.

Durant l’été 2022, la Gironde a brûlé d’un feu monstrueux, combattu avec abnégation par les pompiers dont je veux ici saluer le courage.

Ces catastrophes, qui étaient jusqu’à présent exceptionnelles, seront demain la norme. En 2021 et 2022, nous avons connu les trois plus grands incendies de ces quarante dernières années ! Il y a dix ans, les prévisions météorologiques estimaient que ces phénomènes surviendraient en 2040-2050.

Il n’y a aucun doute : ces feux sont les conséquences directes du changement climatique. Des feux plus nombreux, plus étendus, plus violents : voilà à quoi nous devons nous préparer. De l’Aveyron à la Bretagne, en passant par la Gironde et les Vosges, après le Sud-Est, l’ensemble du territoire français est dorénavant concerné. Les experts sont unanimes : près de 50 % des forêts françaises seront menacées par le risque incendie d’ici à 2050.

Malgré la mobilisation de deux mille sapeurs-pompiers, malgré les cinquante mille évacuations préventives et malgré la solidarité des milliers de bénévoles, les feux en Gironde ont souligné notre vulnérabilité au risque incendie. Nous devons en tirer les leçons.

Je tiens à saluer le travail de la mission de contrôle et des rapporteurs qui sont à l’origine de cette proposition de loi. Avec soixante-dix recommandations, le rapport d’information issu de cette mission a permis d’établir un diagnostic clair et partagé.

Le texte que nous examinons aujourd’hui traduit l’essentiel de ces recommandations. Il permet, notamment, de renforcer les moyens des Sdis, de favoriser l’adaptation des forêts au changement climatique, de créer un nouveau droit de préemption pour les communes et d’établir des cartes d’aléas pour suivre l’évolution du risque.

Après les feux gigantesques qui ont marqué l’été 2022, le Président de la République, Emmanuel Macron, avait annoncé une stratégie nouvelle de lutte et de prévention contre les incendies. Ce texte porte des mesures fortes. Il offre un début de réponse et ouvre la voie, mais il manque d’ambition sur plusieurs points essentiels.

La prévention du risque incendie est la pierre angulaire d’une stratégie de long terme. Alors que 95 % des départs de feux sont d’origine humaine, acquérir une nouvelle culture du risque est un enjeu majeur. Les mesures proposées dans ce texte nous semblent insuffisantes.

Nous déplorons également l’absence d’éléments sur le renforcement des moyens humains de l’ONF. Ses agents sont des sentinelles du climat et de la forêt ; pourtant, en trente ans, ils sont passés de quinze mille à moins de neuf mille.

De même, en pleine crise du volontariat et face à l’intensification du risque, il s’agira d’augmenter le nombre de sapeurs-pompiers professionnels et les moyens qui leur sont alloués.

Notre politique de lutte contre les incendies doit tenir compte de l’évolution du risque sur l’ensemble du territoire. Cette stratégie passe par l’affectation équitable des moyens nationaux.

Alors qu’un incendie doit être repéré et traité dès qu’il apparaît, la protection aérienne des Canadair et des Dash se révèle cruciale. Le temps d’autorisation et l’éloignement des appareils ne sont pas compatibles avec la temporalité des incendies. Il faut une flotte plus importante et une répartition adaptée de la flotte sur le territoire.

Au regard de l’exposition colossale du sud-ouest de la France au risque incendie, un prépositionnement des moyens aériens, par exemple en Nouvelle-Aquitaine, paraît essentiel. Nous demandons, en ce sens, une étude sur l’opportunité de créer une seconde base aérienne de la sécurité civile, comme s’y était engagé le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, en octobre dernier.

Enfin, nous restons vigilants sur les éventuelles dérives que le texte pourrait engendrer. La prévention et la lutte contre les incendies nécessitent des aménagements indispensables et des efforts importants. Mais elles ne peuvent se faire au détriment de la biodiversité et des écosystèmes, qui sont essentiels pour adapter nos forêts et réduire le risque.

Permettez-moi, mes chers collègues, de citer Charles Darwin pour rappeler, ici, que « les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements ».

L’équilibre à trouver n’est pas simple. Pour participer à ce rééquilibrage, sans jamais perdre de vue l’objectif de la proposition de loi, nous proposerons plusieurs amendements au cours des débats. Nous espérons qu’ils seront adoptés afin d’apporter des réponses à la hauteur des enjeux.

Ce texte constitue néanmoins une première étape essentielle pour prévenir et lutter contre le risque incendie. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera pour cette proposition de loi.

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