Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « des incendies dévoraient le ciel aux quatre coins de l’horizon », « les nuits n’étaient plus noires, mais rouges » : ces mots apocalyptiques de René Barjavel, tirés de son roman Ravage, décrivent-ils le futur de nos campagnes ? Avec leurs deux mille deux cent quarante hectares brûlés en 2022, les Ardéchois seraient bien tentés de répondre par l’affirmative, d’autant plus que la sécheresse hivernale actuelle laisse présager de nouveaux records d’incendies.
Baisserons-nous les bras pour autant ? Non ! L’intensification des feux de forêt n’est pas une fatalité et le travail méticuleux des auteurs et des rapporteurs de cette proposition de loi redonne volonté et espoir à ceux qui combattent le feu, à commencer par nos pompiers.
Dans cette lutte, ils ne sont pas seuls, et je veux d’abord souligner le rôle fondamental des collectivités territoriales. Les plans de prévention des risques d’incendies de forêt (PPRIF) constituent un bon outil et je soutiens la volonté d’encourager les collectivités à se regrouper selon une logique de massif. En effet, le feu ne s’arrête pas aux frontières communales.
Je salue la création, à laquelle tend cette proposition de loi, d’une délégation à la protection de la forêt inspirée d’une structure associant déjà les départements méditerranéens, ainsi que la Drôme et l’Ardèche, et dont je peux témoigner de l’utilité.
Nous devons, à tous les niveaux, faciliter l’action de ceux qui combattent le feu en première ligne : les pompiers de nos Sdis. Comme le préconisent nos rapporteurs, il faut faire respecter beaucoup plus strictement les obligations légales de débroussaillement. C’est un point crucial, car le défaut de débroussaillage provoque des feux en zone habitée qui pourraient être évités. En cela, ils concentrent les efforts de nos pompiers et les détournent de la stratégie générale de lutte contre les sinistres.
De même, les dispositions permettant d’accroître la résistance des bâtiments aux incendies de forêt sont inspirées des servitudes instaurées dans le cadre des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), passant par la plantation d’une végétation qui fait tampon. Je pense notamment aux cultures faisant office de coupe-feu, comme les oliveraies ou les vignes entretenues.
Suivant cette logique, le réaménagement effectué à la suite d’un incendie de forêt est primordial. Il s’agit non seulement de réhabiliter les espaces détruits, mais également de les aménager de telle sorte qu’un futur feu verra ses effets amoindris. Il faut enfin parer à l’apparition d’autres risques, comme les glissements de terrain survenant à cause de la perte du couvert végétal.
Je veux rappeler ici que la force menante contre les incendies, ce sont les Sdis. À ce sujet, je me félicite de l’opiniâtreté de nos rapporteurs qui ont introduit des dispositions déjà promues par le Sénat, à savoir la réduction des cotisations patronales pour les employeurs de pompiers volontaires et la suppression de la TICPE pour les Sdis.
Dans leur lutte contre des feux dévorants extrêmement violents, comment imaginer que nos services de secours puissent être empêchés ici par une pénurie de matériel, là par un problème de personnel ou de formation ? Sans un appui financier plus prononcé de l’État, leur engagement sera difficilement supportable. L’été 2022 nous en offre la plus dramatique illustration, avec des Sdis à la limite de la rupture.
Une politique publique de lutte contre les incendies est extrêmement coûteuse et concerne autant l’État, les collectivités, les agriculteurs, les services de secours et les particuliers. Nous savons que les décennies à venir seront plus chaudes, que les feux seront plus fréquents et sur des périodes de l’année plus étendues. Anticipons, madame la ministre, et lançons une stratégie sur le long terme avec des plans de financement pluriannuels !
Pour conclure, je tenais à saluer et à encourager les réserves citoyennes de sécurité civile, comme celle récemment créée à Lagorce, dans mon département, l’Ardèche. Elles ont pour mission d’agir en amont, de patrouiller et d’aider les pompiers. En accompagnant les soldats du feu et en complétant les efforts importants fournis par les agriculteurs, elles permettent aux citoyens de s’engager eux-mêmes clans la défense de leur environnement, montrant ainsi que les ravages ne sont pas inéluctables.