Intervention de Roland Lescure

Réunion du 6 avril 2023 à 14h45
Protéger le groupe électricité de france d'un démembrement — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l'industrie :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, notre vision pour EDF est claire : l'énergéticien national est au cœur de la transition énergétique du pays.

C'est aussi la vision qui régnait il y a près de soixante-dix-sept ans, quand Marcel Paul, un ministre communiste, présidait à la création d'EDF, avec comme objectif l'instauration d'un monopole de l'énergéticien. En soixante-dix-sept ans, ce monopole a permis l'électrification du pays et la construction du deuxième parc nucléaire au monde.

Nous bénéficions des fruits d'une telle décision encore aujourd'hui, puisque notre pays dispose d'un mix électrique parmi les moins émetteurs de gaz à effet de serre et les plus compétitifs au monde.

Depuis vingt ans, notre énergéticien national est affecté, en bien et en moins bien, par l'ouverture sur l'Union européenne – je pense notamment à la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité et aux conséquences du sommet de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 qui a conduit à la libéralisation du marché de l'électricité et du gaz.

Ce marché intégré a certes des défauts, et nous travaillons à y remédier, mais reconnaissons tout de même, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'il constitue aujourd'hui le plus gros système intégré d'électricité du monde, ce qui permet à notre pays d'importer et d'exporter de l'électricité quotidiennement en fonction de ses besoins.

Ayant vécu une dizaine d'années au Québec, où depuis deux jours, 1 million de foyers sont privés d'électricité, je mesure les avantages d'un marché intégré de l'électricité.

Notre vision pour EDF est claire : le groupe Électricité de France est et restera un instrument essentiel pour mettre en œuvre la politique énergétique de l'État français et, au-delà, un champion à l'exportation.

Les objectifs prioritaires d'EDF – cela est clairement indiqué dans la lettre de mission de son nouveau PDG Luc Rémont, dont vous avez validé la nomination – s'articulent aujourd'hui autour de la production électrique et de la conduite des grands projets industriels.

EDF a besoin d'investir des dizaines de milliards d'euros tous les ans, ce qui suppose de disposer de moyens suffisants et d'une véritable crédibilité financière.

EDF a besoin de retrouver sa maîtrise industrielle dans le nucléaire.

Enfin, EDF a besoin de développer les énergies renouvelables, en se fixant des objectifs ambitieux pour les trente prochaines années.

Le Gouvernement a pris ses responsabilités pour aider le groupe à relever ces défis. D'abord, l'État a toujours accompagné EDF dans ses opérations de recapitalisation, que ce soit en 2017 ou en 2022. Ensuite, et bien que nous nous apprêtions à accélérer encore, le fait est que nous n'avons jamais autant investi dans le nucléaire que depuis 2017.

Nous avons aussi sécurisé le calendrier de l'EPR2 (Evolutionary Power Reactor) grâce au projet de loi relatif à l'accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes, que vous avez voté en première lecture.

EDF est toutefois une société endettée, qui a de gros besoins d'investissement. C'est pourquoi, conformément aux engagements pris par le Président de la République durant sa campagne, le Gouvernement a lancé dès l'été dernier une offre publique d'achat (OPA) visant à prendre le contrôle de 100 % du capital d'EDF. Le Parlement a libéré 9, 7 milliards d'euros de crédits budgétaires à cette fin.

Par cette nationalisation, nous renforçons à la fois les moyens dont EDF dispose pour investir dans les prochaines années et la crédibilité financière du groupe. Comme vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, l'offre publique d'achat est en cours de finalisation, elle devrait être prête d'ici au début de mois de juin, après épuisement des derniers recours.

Ce gouvernement répond donc aux véritables problématiques du groupe EDF, si bien que nous avons été quelque peu surpris par l'inscription de cette proposition de loi visant à la nationalisation d'EDF au calendrier parlementaire, et plus encore par la manière dont s'est déroulé son examen à l'Assemblée nationale, où les débats ont parfois flirté avec les théories du complot.

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